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PALÉONTOLOGIE. 239 ment) soudées et montrent la grande différence qu'il y a entre les croco- diles actuels et ces anciens sauriens de la période secondaire. Je me presse de terminer, ayant le plus grand désir de faire connaître cette ad- mirable pièce, unique, et qui sera la perle devotre Musée. Tous les géo- logues quj.l'ont vue ont été stupéfaits de ses énormes dimensions et de sa perfection. M. P . Gervais m'a assuré qu'il n'a jamais vu de pièce qui puisse être comparée comme importance et comme beauté à cette mer- veille paleontologique. J'ose espérer que vous me pardonnerez d'avoir été long ; c'est absolument indispensable pour ne rien hasarder dans sa res- tauration. . .Dans l'état où est maintenant la télé du Steneosaurus bur- gemis, ( c'est par plusieurs milliers de francs qu'il faudrait l'estimer...» Si quelques-uns sont tentés de sourire de l'enthousiasme de ce savant, qui tient un fait nouveau, tant pis pour eux ! Je le comprends et voudrais le partager. Je n'ai pas été frappé de la beauté du crocodile de Alontmerle précisément. Mais il y aura profit pour nous et plaisir à revoir et à inter- roger ce témoin du commencement des choses. Pour comprendre ce que raconte silencieusement son rictus hideux, il n'y a pas besoin d'être sa- vant. Les pires sourds, ceux qui ne veulent pas entendre, l'entendront eux-mêmes. Quand ce saurien était le propriétaire incontesté du Rever- mont, ce pays était une île basse, planté d'arbres étranges (de palmiers? dont l'un est conservé), battue par de grandes eaux plus tièdes que nos mers et peuplées d'autres amphibies plus monstrueux encore. Le peuple crocodile vivait là d'une vie puissante, exempte d'inquiétudes, le ciel ne tombant pas, la mer étant profonde, la rive basse, couverte d'un sable fin, disposé à miracle pour recevoir ses œufs. Ces premiers nés du monde, créés pour jouir, laissaient au soleil le soin de couver leur progéniture : ils pensaient, ils devaient penser que l'astre était fait exprès pour cela., De l'homme, pas do nouvelles. M. l'abbé Bourgeois ne trouve ses traces que dans le terrain tertiaire. L'être chétif qui vivotte là cst-il bien l'hom- me ? Le Sleneosaurus burgemis n'y eût pas tant regardé et n'en eût fait qu'une b o u c h é e . . . Non. A l'âge tertiaire les continents sont éclos ; les grands sauriens se sont retirés devant les premiers mammifères, les premiers oiseaux, les premières fleurs. Qu'on veuille bien ne pas là -dessus s'enquérir si je suis darwiniste, posi- tiviste ou seulement naturiste. Je ne sais pas très-bien ce que c'est. La vie est courte j les faits qu'il faut connaître se multiplient. Nous notons celui- ci et passons à un autre. JARRIN. (Annales de la Société d'Emulation de l'Ain),