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                  NOUVELLE DAUPHINOISE.                 219

   — Qui peut le savoir ? répétait la mère, avec des yeux
rougis par les veilles ; ô mon Dieu ! faites que la France
soit sauvée et mon fils avec elle ! Pitié ! Pitié !
   — Marguerite, disait tout bas Julien à la jeune fille,
donne-moi une boucle de tes cheveux blonds; je la met-
trai sur mon cœur, avec ta photographie et celle de ma
mère, je les baiserai tous les jours !
   Ces chers souvenirs, mouillés de larmes, formèrent le
trésor du soldat, bien mieax encore que la somme très-
rbnde que le bon père François ne manqua pas de donner
à son fils, avec sa bénédiction énergique, son embrassade
attendrie, — entremêlées de citations militaires de ses cam-
pagnes d'Afrique. — Julien s'arracha des bras de sa mère,.
de Marguerite et de François, qui l'avaient accompagné à
Montélimar, et pour ne pas les voir sangloter plus long-
temps, comme aussi pour leur cacher sa propre émotion,
il s'élança brusquement dans la direction où l'appelait
son devoir.
                              VI
   C'est avec un légitime orgueil que je constate que nos
Dauphinois se sont souvenus de la bravoure de leurs pères;
et qu'ils ont été cités parmi les mobiles qui se sont très-
bien conduits. Que voulez-vous ? Noblesse oblige. — Le
duc de Lévis avait raison de le dire, et son bon sens de-
vait lui faire comprendre dans ce mot : Noblesse, celle de
l'âme surtout, que l'on soit plébéien, ou appartenant à la
caste patricienne. L'honneur; le courage, le dévoûmest,
l'intelligence, voilà les premières distinctions. En Dau-
phiné, presque tout le monde est noble de cette manière.
   Le 2 œ0 bataillon des mobiles de la Drôme, dans lequel
avait été incorporé Julien, fut envoyé, le 8 septembre, à
Paris, pour défendre cette ville, en prévision d'un siège.
C'est de là que fut datée la première lettre du jeune homme
à sa famille. On la porta immédiatement chez Marthe,
pour la lire, la relire, la dévorer des yeux, et finalement
pour la commenter avec tendresse. Les pauvres petites