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410 LA REVUE LYONNAISE postulant ; que son grand âge ne lui permet pas de frapper trop longtemps, sous les froids d'hiver, à la porte du Temple, pour obtenir le rameau d'or ; que sa santé qui se trouve bien des fraî- ches brises de Provence, n'a nulle envie d'essayer des frissons pernicieux de la Fièvre verte... Aux amis qui ambitionneraient pour lui l'habit palmé il répond modestement comme Béranger : Chers amis, laissez-moi de grâce, Laissez-moi dans mon petit coin. Eh bien ! laissons-le. Nous y perdrons un discours, la louange peut-être d'un vaudevilliste défunt, mais nous y gagnerons des Souvenirs. Des souvenirs!... on en voudrait toujours, comme des pralines de la Duchesse, comme il voulait lui-même encore des improvisations de Tlialberg. Laissons-le se rappeler. «L'homme d'ailleurs, » dit-il dans la première partie de ses mémoires, « qui marche ou s'arrête en pleine lumière, n'aperçoit rien au delà de ce foyer lumineux qui semble rendre plus épaisses les ténèbres envi- ronnantes. L'homme qui s'achemine dans l'ombre n'a qu'à lever les yeux pour "compter les étoiles ou contempler les feux épars qui brillent à l'horizon.» Laissons-le hors de l'Académie: les dis- cours faits à sa porte sont souvent plus intéressants que ceux prononcés dans son enceinte. Laissons4e achever ses mémoires. Ils nous diront modestement ce qu'il y avait de grandeur et de fécondité dans ce beau chêne du pays de Provence, dont le tronc fléchit sans que ses robustes rameaux perdent leur vivace feuillée. MARIUS J O U L I E .