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226 LA R E V U E LYONNAISE de tout ce qui leur paraîtrait avantageux de prendre. Jusqu'à na- guère on n'avait que des notions vagues sur les agissements de ces commissaires et sur le butin qu'ils emportèrent. Aucun écrivain lyonnais, pas même les conservateurs de la Bibliothèque de la ville, n'avaient songé à se rendre un compte exact de la nature et de la valeur de ces enlèvements. J'ai donc cru devoir me livrer à quel- ques recherches à cet égard, et,grâce au savant et affectueux con- cours de MM- Léopold Delisle, directeur de la bibliothèque natio- nale et Pierre Bonnassieux, attaché aux archives nationales, j'ai pu obtenir les renseignements les plus complets sur tout ce que la Convention s'est permis de nous prendre dans ce douloureux moment où aucune protestation n'était possible. La plus humble prière eût été alors un crime puni de la peine capitale les travaux commencés par la commission des monuments et publia de nouvelles instructions. Sur la fin de l'année 1795, le ministre de l'intérieur réorganisa la com- mission temporaire des arts qui ne tarda pas à s'appeler le Conseil de conservation des sciences et arts. Il est assez intéressant aussi de connaître les instructions que la commission temporaire des arts publia.i'an II « pour la conservation des objets pouvant ser- vir aux arts, aux sciences et à l'enseignement. » On y lit entre autres, en ce qui concerne les antiquités : « La plupart des monuments de l'antiquité, est-il dit (pag. 44), n'offrent aux sujets des despotes qu'un spectacle pénible, que des souvenirs amers, que des leçons inutiles, puisqu'ils ont si rarement le courage d'en profiter. Les peu- ples libres, au contraire, aiment à y trouver le génie des arts soutenu par celui de la liberté. Ils y trouvent des modèles, et ce genre d'étude qui lie la Grèce et l'Italie républicaines à la France régénérée, est un de ceux dont il importe le plus de r é . pandre le goût et de favoriser l'enseignement. « Quant aux médailles, on pourra, ajoute le rédacteur de ces instructions, on pourra composer de bons métaux la collection des médailles des peuples et des villes, celle des oppresseurs de l'humanité connus sous les dénominations d'empereurs, de rois, de princes; etc. » Enfin quant aux imprimés, voici les grotesques prescriptions données aux auto- ités locales chargées de recueillir tous les livres confisqués, et dont plus d'un agent ne savait même pas lire... « Les recueils de livres sont de toutes les richesses littéraires celles qu'on trouve partout avec le plus d'abondance. Toutes ces bibliothèques que le luxe des riches et l'orgueil des prêtres avaient établies à grands frais, conquises par la Révolution, seront'inventoriées avec soin. Malheureusement il est peu délivres où la vérité brille dans tout son jour et il en est trop où Von ne voit que des mensonges. Mais pour bien connaître la vérité et pour s'en assurer la jouissance, nïmporte-t-il pas aussi de savoir quelles sont les sources de l'erreur, sous quelles formes elle aime à se montrer, quels procédés elle choisit, quelles routes elle préfère, et quelles sont celles de ces ruses qui ont le mieux réussi et dont les effets ont duré le plus longtemps, tous ce point de vue il est bon de noter les ouvrages où les fauteurs des préjugés les plus désastreux ont réuni leurs moyens, de les déjouer à jamais, en dévoilant leurs complots, et de leur porler le dernier-coup avec les armes de la raison dont il est enfin permis à chacun de se servir. »