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LE MARIA&E DE SÉVERINE 95 est à tous les points de vue exactement le contraire de ce que je veux que mon mari soit. — C'est bien, n'en parlons plus, répondit Glotilde. Et, il y eut un silence. Le banquier avait chargé Mmc Evrard de faire tout ses efforts pour que Ghauret fût accepté : devant l'échec de ce dernier, son mandat s'étendait-il jusqu'à pouvoir offrir un autre parti à Séverine? c'est ce qui lui sembla résulter incontestablement de cette phrase de M. Lefort qu'elle avait soigneusement retenue : « Si elle aime quel- qu'un, qu'elle vous le dise et rien ne m'arrêtera pour lui donner le mari de son choix. » Aussi se trouva-t -elle parfaitement autorisée à parler en ces termes à Séverine. — Tu as refusé, y compris M. Chauret, tous les partis qui se sont présentés; tu attends, m'as-tu dit, pour te décider, qu'il s'en présente un qui te plaise. Aurais-tu distingué quelqu'un? Ton père m'a chargée de te le demander et te conjure de me le dire. Séverine ne répondit pas. — Voyons," mon enfant, dit Mme Evrard en l'attirant tendrement à soi, comprends donc que ce n'est point une vaine curiosité qui me pousse à te parler de la sorte, mais le souci le plus vif, le plus sincère de ton bonheur. Pourquoi me cacher rien? Tu ne crains pas, je suppose, que je te trahisse, que j'abuse de ta confidence?... — Oh!.,, murmura Séverine. — Eh bien ! alors parle... ou plutôt non, ma pauvre enfant, ne dis rien, c'est inutile, ton silence répond pour toi; ilya, n'est-il pas vrai, quelqu'un qui ne t'est point indiffèrent? Séverine fit signe que oui. — Et ce monsieur t'aime-t-il? interrogea Clotilde... Belle ques- tion, ajouta-t-elle en riant, comment ne pas t'aimer ! Alors pour- quoi ne te demande-t-ilpas? Tu ne l'aurais pas refusé, celui-là , au moins... Mais parle donc enfin ! comment veux-tu que je te vienne en aide, si tu ne me racontes pas ton petit roman ? —11 n'y a pas de roman, fit Séverine toute rougissante ; ce mon- sieur me plaît et je crois que ]e ne lui déplais pas., voilà tout... — Voilà tout... tu es magnifique... voilà tout!... Pourquoi, je le répète, ne te demande-1—il pas, ce fortuné mortel ? — Je crois qu'il n'ose pas parce qu'il est pauvre.