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42 LA REVUE LYONNAISE une fontaine. 11 y a encore, dans les jardins, le long des rues et sur la place, des arbres d'espèces variées : le palmier, le cocotier, trop connus pour que j'en dise rien, le filas qui porte en guise de feuilles des filaments grêles, d'une nuance pâle, le porcher dont la fleur multicolore a la forme d'un liseron double, le frangipanier dont la petite fleur blanche exhale une odeur de jasmin d'Espagne et d'oranger, le flamboyant qui ressemble à un colossal bouquet de verveine rouge artistement entremêlé de verdure. Il y a enfin, sur tous ces arbres, des nuées de corbeaux tapageurs qui s'appri- voisent jusqu'à venir chercher aux pieds de l'homme les miettes tombées de sa table et poussent même parfois l'indiscrétion jusqu'à se servir les premiers. Je crois que je n'ai rien omis et qu'un Guide Joanne n'aurait pas été plus minutieusement exact. La ville blanche emprunte son nom aux quelques centaines de blancs qui l'habitent ; l'Annuaire porte ces quelques centaines à un millier, femmes et enfants compris. Les Européens entrent pour un quart environ dans ce chiffre ; le reste se compose tant des créoles de l'Inde que de ceux des autres colonies. Les créoles se distinguent, en général, par un ton de bistre plus ou moins foncé, suivant le croisement plus ou moins lointain des races. On a dit : « Grattez le Russe, vous retrouverez le Cosaque ; » il pourrait arriver qu'en grattant bon nombre de créoles, on retrouvât très vite le noir originel. Il en est qui sont purs de tout mélange, actifs, instruits, modestes et de relations char- " mantes ; mais il en est aussi qui possèdent précisément et à un degré remarquable, les défauts de ces qualités. Les femmes sur- tout se laissent facilement aller aux mœurs imbéciles et corrom- pues de leur entourage indien. Il est de notoriété que quelques- unes d'entre elles se nourrissent comme les indigènes, mâchent le bétel et l'arec, s'oignent d'huile de coco et passent leurs jour- nées accroupies sur des nattes, au milieu de servantes noires qui leur chatouillent délicatement la plante des pieds avec des plumes de paon. Leur religion est un agréable mélange de catholicisme et de paganisme. Elles croient à la Trinité, mais Vichnou et Siva ne leur paraissent pas impossibles.