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230;                   LA REVUE LYONNAISE
             Qu'au vent des passions votre chair s'est flétrie ;
             Pourquoi nous condamner, nous autres, au tombeau ?

             La poésie est morte ! ah ! Dieu la fit trop belle
             Pour la laisser mourir étouffée en vos bras.
             Un poète l'a dit : cette langue immortelle,
             Quand on ne l'aime plus, c'est qu'on ne l'entend pas.

             Ah ! c'est que le poète est né pour la souffrance,
             Pour les ambitions nobles et pour les pleurs;
             Oubliant que jusqu'à la mort, dès la naissance,
             Les grandes passions font les grandes douleurs.

             Et cet homme qui souffre, en proie à la torture,
             On le raille, on l'insulte, ô blasphème éternel!
             On le traîne vivant sur une claie impure,
             Le sourire à la lèvre, et le regard au ciel !

             Et si cet homme, un jour, veut chanter son martyre,
             Si son cœur est trop plein des outrages reçus,
             Une voix de démon brise en ses mains la lyre :
             « La poésie est morte et ne renaîtra plus ! »

              C'est leur refrain à tous, chacun d'eux le répète !
              Les fous! La poésie est sœur de la douleur;
              Et tout homme qui souffre et pleure est un poète,
              Chaque larme est un vers, chaque poème un cœur...
                                                        MARC ANDRÉ 1 .



   Dans un genre tout différent, voici mon autre perle : après la
plainte amère et puissante du poète méconnu ou bafoué, voici la
grâce fine et la touche légère d'un délicat de la bonne école, poète
lui aussi, mais couronné de fleurs, et chantant gaiement en plein
rayonnement de soleil et de vie.

                                   PASTEL

                Je lui dis un jour, la voyant si belle
                (Nous suivions tous deux le même chemin) :
                « Veux-tu me donner ton cœur? — Non, » fit-elle,
                Et puis sur son cœur elle mit la main.

  l Trésor lyrique, p. 5.