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60 LA R E V U E LYONNAISE lection qui en comprenait près de cent, et que le dépouillement de ceux que je ne connais pas et qui sont peut-être beaucoup plus importants, suffirait au travail de plusieurs années et à la recons- titution de toute une histoire locale. Il ne faut pas d'ailleurs trop mépriser l'histoire locale. C'est en se servant d'elle, en lui empruntant une prodigieuse quantité de faits savamment choisis et critiqués, que les grands érudits de notre temps arrivent à l'histoire générale. Quand vous rencontrez, comme cela m'est arrivé, un acte passé en Auvergne vers 1568, acte par lequel un paysan vend son oache l, et que le tabellion campagnard ajoute, après renonciation du prix, que la somme a été immédiate- ment employée à la nourriture du vendeur, « veu la dureté des tems que sont de présent en le réaulme de France », n'êtes-vous pas mieux renseigné sur les malheurs des guerres de religion par ces deux lignes que par des volumes de mémoires ? Quels effroya- bles temps que ceux où le cultivateur, après avoir vendu tous ses biens pour faire vivre sa famille, attend que la faim lui morde les entrailles pour aliéner à vil prix son dernier enclos et acheter de sa ruine le pain qui doit le soutenir ! II Avant la Révolution, dans tous les villages de France, à l'issue de la messe ou des vêpres dominicales, les paysans se réunissaient sous le grand orme qui ombrageait le porche de l'église. Le lieute - nant du bailliage ou le curé présidait l'assemblée etouvrait laséance. Le notaire du lieu s'en trouvait presque toujours le secrétaire et en dressait les procès-verbaux qu'il conservait dans son étude. Je signale ces documents comme d'utiles témoignages de la vie commu- nale, paroissiale surtout, sous l'ancien régime, où sont admirable- ment enregistrées les variations de l'esprit public. 11 est curieux d'y voir Jacques Bonhomme se gouverner lui-même. Bien plus qu'à * Petite terre ou verger autour de la maison.