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128             UNE PAGE DE LA VIE LYONNAISE

sévères qui commandent le respect, le charme et l'agrément
dans le commerce habituel de la vie. — Le tour original de
son esprit, son ardeur, sa verve, la finesse de ses apprécia-
tions, une certaine candeur naïve, tout chez lui, jusqu'à la
gaucherie un peu provinciale dont il ne se défit jamais,
avait de la grâce. »

   Fouillons la correspondance qui s'établit bien vite entre
les différentes personnes de ce petit cénacle, pour combler
le vide des jours d'absence et nous verrons toute la délica-
tesse de ce commerce d'amitié.
   Voici d'abord une lettre que Camille Jordan écrit, sous le
coup d'une terrible nouvelle (21), la ruine de M, Récamier :



                                              Lyon, le 28 octobre 1806.

   « Chère Juliette, je n'ai point de paroles pour vous dire
à quel excès je suis affecté de vos douleurs, de celles de
votre mari.
   « Quand les plus étrangers sont émus, vous jugez ce
qu'éprouve celui que tant de liens attachent à vous. Il y a
deux jours que je sais la terrible nouvelle, j'en suis encore
au premier saisissement : ma pensée ne vous quitte pas,
j'erre dans cette maison, je vais de votre mari à vous, je
mêle mes larmes aux vôtres.
   « On dit, Juliette, que vous êtes un modèle de courage,
de résignation, de détachement, que c'est vous qui consolez
et soutenez votre mari. Je vous admire, mais je ne m'étonne
pas, je retrouve celle dont l'élévation, la noblesse, sous des


  (21) M m c Récamier et ses amis, p. 3 1 .