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78                     LE PORTEFEUILLE

de l'histoire. De bien petites miettes en vérité!... Cependant
le portefeuille de Franki recèle plus d'un trait de mœurs
intéressant, quelques détails pittoresques. Du reste, ce n'était
pas celui du premier venu ; il contenait un brevet d'opéra-
teur ordinaire et privilégié du Roy(i). Sans prétendre jouer à
l'historien, il est bon de recueillir, lorsqu'on les rencontre,
les moindres faits utiles pour reconstituer le passé et
retracer le tableau de la vie populaire de l'ancienne société
française, surtout lorsqu'à défaut d'un intérêt majeur, les
faits ont au moins le mérite de ne pas être des renseigne-
ments de seconde main et de présenter les caractères d'une
absolue sincérité.


   Aux XVIIe et xvme siècles, la plupart des charlatans qui
opéraient en France, étaient nés en Italie et avaient l'habi-
tude de s'habiller en Turc. Pourquoi Italiens? Peut-être
parce que le génie de ce peuple s'accommodait mieux que le
nôtre de ce métier de faiseurs de dupes. Pourquoi s'habil-
laient-ils en Turc? Sans doute parce que l'étrangeté et
l'éclat du costume étaient plus aptes à frapper l'imagination
des gens naïfs auxquels ils s'adressaient. Dominique Franki
n'eut garde de manquer à ce double trait caractéristique de
tout bon charlatan. Il naquit à Bénévent dans le royaume
de Naples en 1707 ; mais dans de nombreux brevets ou
diplômes il est qualifié Turc de nation ou Turc de Constanti-
nople. Sa femme demeurée en Italie lui écrit à Marseille et
adresse ainsi sa lettre : Domenico Franki il Turchetto.
   Franki fut l'inventeur du baume d'Arabie pour les dou-
leurs, rhumatismes, foulures, coupures et brûlures et d'un


  (1) Lettres sur parchemin du 29 décembre 1752, n° 51 du dossier.