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                   DE GABRIEL DE SACONAY                     41

 dominoient avec bon nombre de soldatz munis de plusieurs
 arquebuses à croc et autres pièces de fonte qu'ilz avoient
 sur charretes, conduict de Lyon en ce lieu avec autres
 munitions nécessaires et sembloient qu'ilz deussent attendre
 un siège d'une bien grosse armée. Mais le bon Dieu, qui
 rend confuse la force et prudence mondaine, inspira cer-
 taines bonnes dames (restées en icelle ville à leur bien grand
 regret pour la garde telle quelle de leurs maisons et familles)
pour faire veoir par icelle comme en hester ses merveilles
et confondre ces Holofernes hérétiques et délivrer son
peuple de leur tirannie. Ainsi s'adressant ces bonnes Dames
aux soldatz de l'Evangile nouveau ont eu leurs paroles telle
force et grâce de Dieu, qu'elles leur persuadèrent estans
saisis de terreur divine s'enfouyr et abandonnèrent lad.
ville qui devoit bien tost estre assiégée (disoient elles),
combien qui ny en eust aucune apparence. De ces paroles
et ayest des dames une certaine frayeur provenant de Dieu
surprict tellement ces soldatz qu'ilz les requirent à mains
joinctes de leur donner le moien de pouvoir évader et
sortir hors la ville estant leur capitaine saisi des clefz
d'icelle. Alors le cueur viril ayant abandonné l'Evangile et
saisi ces Dames catholiques, elles leur montrèrent quelques
endroictz les plus aisés pour saillir des murailles et sans
attendre l'aide de quelques cordages se précipitèrent les
uns sur les autres dans les fossez non sans se blesser et
offenser, avec telle fraieur que s'ilz eussent estez poursui-
viz par ennemys qui eussent emporté la ville par assault,
et cependant ilz n'en avoient aucuns plus près que de deux
à trois lieues, qui n'avoient encore aucunes aprestes pour
les assaillir.
   Le capitaine des réformés commandant dans lad. ville,
bien qu'il eust sa bonne part de l'effroy, si eust il quelque