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LES BIBLIOTHÈQUES DE LYON i35 précieux et les reliures les plus riches. Confié soit aux Jésuites, soit aux Oratoriens , si habiles dans le grand art de l'enseignement qui demande un dé- voûment et une abnégation qu'on ne rencontre souvent que dans les ordres religieux que ne préoccupent ni les besoins ni les soucis de la vie domestique, le collège était des plus florissants ; sa réputation s'étendait au loin, et il en sortait des centaines d'élèves, dont beaucoup ont laissé un nom glorieux. Mais, je l'ai déjà dit, l'heure fatale de la Révolution vint à sonner, et la bibliothèque et le collège ne furent bientôt plus qu'une vaste solitude. Les hommes studieux désertèrent les salles de lecture ; les élèves furent retirés bien vite par leurs parents effrayés et déjà mena- cés. Bientôt les voûtes de la grande salle retentirent du bruit formidable du canon. Les Lyonnais indignés du joug odieux de la Convention, préférant la mort à un servage intolérable, avaient couru aux armes, chassé les conven- tionnels, et, debout sur leurs faibles et vieux remparts, ils présentèrent courageusement leur poitrine à une armée énorme et pourvue de tout. La grande salle et la terrasse avait été converties en batteries, dont le canon, servi par d'adroits et d'intrépides artilleurs, foudroyait les batteries des assiégeants assises sur la rive gauche du fleuve ; mais celles-ci et d'autres, situées à la Croix-Rousse, eurent bientôt couvert le bâtiment de bombes et d'obus, et les pauvres Lyonnais, écrasés par un feu aussi formidable, périrent tous à côté de leurs pièces démontées. Le bâti- ment conserve encore de glorieux stygmates de cette no- ble résistance, et l'un des globes' montre le trou qu'y creusa une bombe. Ce même globe témoigne aussi de l'idiotisme de l'un des tristes vainqueurs de notre malheu- reuse ville. Pour obéir au décret de la Convention, quij avait enlevé à Lyon son nom et lui avait substitué celu