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É>1TRES D'ANGE POLITIEN. 421 les mers qui l'environnent. Là , pleure sans fin la triste Niobé devenue rocher. Là , coule le fleuve Mélès, q u i , taciturne dans sa grotte, entend les cygnes essayant des airs nouveaux. Là , si nous en croyons la sainte antiquité, naquit le plus grand des poètes. Le dieu qui inspire les muses dans l'Aonie , et qui préside à leurs aimables danses, avoit laissé à la jeune Crithéïs (1) un gage de son amour, et cette amante d'un Dieu donna le jour à un fils qui avoit tout le génie de son père. Aussi, d'abord on l'avoit trempé dans les sources divines. Les premiers accents de son enfance calrnoientj dit-on, les flots de la mer en courroux; il appaisoit les vents furieux, il adoucissoit les animaux les plus cruels : à sa voix, le triste rocher du Sipyle cessoit de répandre des larmes 1 L'enfant sublime rampoit un jour sur les bords d'un fleuve : une jeune Naïade vint l'enlever dans ses bras délicats, et l'alla montrer à son père. Elle vint le déposer ensuite sur les roseaux, après l'avoir couronné de fleurs et de persil. On rapporte même, si l'histoire n'est pas men- songère, que les muses lui envoyèrent des guirlandes détachées du front des Heures, et qu'elles lui firent téter leur sein virginal, comme jadis Minerve avait présenté le sien à Erecthée de l'Attique. Quand il put assurer ses premiers pas et bégayer quelques syllabes, son amusement étoit de joindre des chalumeaux avec de la cire de l'Hybla. Ses accords naissants furent consacrés à Bromius; sa bouche pieuse ne chantoit que les dieux, ses doigts créa- ('') Crithéïs, fille de Ménalippe, athénien d'origine, établi à Curnes en Ionie, passa, après la mort de ses parents, JOUS la tutelle de Cléanax, ami de son père. Ce Cléanax, d'après Hérodote, abusa du dépôt qui lui était confié, et la grossesse de Crithéïs s'élant manifestée, il la fit passer à Smyrne, où elle donna le jour à Homère, et fut réduite à filer de la laine pour subsister. Phcmiùs, qui tenait à Smyrne une école, très-accréditée, de belles-lettres et de musique, conçut de l'amour pour elle, l'épousa et adopta son enfant. (Voy, Hérodote, trad. de Larcher.)