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422               ÉPUISES D'ANGE POUTIEN.
teurs parcouroient la flûte légère. Il en tiroit des accents
si pleins, que les faunes dressant leurs oreilles aiguës,
l'a^miroient déjà sous l'ombre voisine. Les satyres venoient
l'entourer, et avec les satyres, les animaux des bois, et les
montagnes qui abaissoient leurs sommets, et les vents qui
se calmoient pour l'entendre. Le Pactole et l'Hermus en
rouloient une plus grande quantité d'or, le Méandre faisoit
taire ses cygnes à l'un et l'autre bord.
   Quand l'enfant céleste atteint l'adolescence et toute la
force des ans, il n'aime plus que les vers. Ceux qu'il com-
pose sont dignes de l'archet d'Apollon, dignes de briser
les rochers du Caucase, de charmer les monstres delà mer
Sicilienne, de triompher des lois de l'Averne, d'arracher
la foudre de la main de Jupiter. Dès ce moment, son âme
 se remplit de l'image d'Achille, et conçoit sous son enthou-
 siasme sacré l'immortelle Iliade. Il est plein de tous les
feux d'Apollon, et pour bien saisir le grand caractère qu'il
avoit à peindre, il va consulter l'oracle d'Achille lui-même
 dans son tombeau de Sigée. A la vue de cette ombre
 terrible qui reparoit à la lumière, le sommet de la mon-
 tagne effrayée se précipite dans la mer, et mugit sur la rive;
l'Ida tremble au loin, le Xanthe cache sa tête à demi-brûlée
 dans sa grotte profonde. Le héros que le poète ne voit pas
impunément lance des regards enflammés, etparoit debout
avecse-s armes redoutables, tel qu'on l'avoit vu aux champs
troyens, bouillonnant de vengeance, tournant sur Hector
la colère qu'il avoit contre les Grecs, et poursuivant en
fureur les malheureux enfants de Dardanus le long des
fleuves et dans la plaine. Sa cuirasse est toute en feu, le
cimier menaçant de son casque inspire l'épouvante. Le
frêne du Pélion, lancé par une main si terrible, brille dans
les airs ; cette ombre haute comme un géant semble acca-
bler Hector de nouvelles blessures ; son ardent bouclier
représente la terre, la mer, le soleil infatigable, enfin, la
sœur.du soleil, remplissant son croissant, .et, parcourant en
silence les ombres de la nuit.