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340 CHRONIQUE LOCALE. — Comme vous voyez. — Elles sont là ? — Je crois que oui. — Vous les connaissiez? — Oh! depuis longtemps. — Mais la chasse n'est pas ouverte. — Vous-même, n'avez-vous pas votre fusil ? — Oh ! moi, c'est différent ; j'allais voir mes maçons et je ne comptais me mettre'en chasse que demain. Il y en a douze? — Hélas ! à présent, onze. — Voulez-vous Un second coup de feu les interrompit. — Qui a tiré ? — Quelque braconnier. — Qui assassine nos perdrix avant l'ouverture de la chasse. — Courons sur lui. M. le maire s'élance, suivi de l'architecte, tous deux sont exaspérés, car, enfin, il faut respecter la loi, surtout la faire respecter aux autres. Nos deux chasseurs, rouges de colère, quittent le bois, percent un grand buisson et se trouvent en présence de M. le garde champêtre, qui, le sabre au côté, la plaque sur sa poitrine, une petite rouillarde à la main, soufflait, en souriant de plaisir, les fines plumes du dos d'une belle perdrix grise qu'il venait de ramasser. — C'est vous, Laramée, dit le maire, content comme un dogue à qui on arrache un os. — Eh ! bonjour, monsieur le maire, vous êtes déjà en chasse aujour- d'hui? Je voulais aller chez vous vous l'offrir. Je me suis dit : Demain, les Lyonnais vont arriver ; ils ramasseront nos perdrix, tâchons de ne leur laisser que les plumes. Tenez, monsieur le maire, elles sont là , dans ce blé noir. Venez ici, monsieur l'architecte, montez par là . Je vais suivre entre vous deux. Tâchons de ne pas en laisser aux négociants. C'est incroyable comme un peu de honte est bientôt bue. En compagnie de l'architecte, leur ami, nos deux défenseurs de la loi battirent les blés noirs, puis les pommes de terre, puis la forêt. Le soir, le père, la mère et les dix enfants avaient disparu, et quand le soleil eut caché ses rayons derrière les montagnes du Beaujolais, quand la lune laissa paraître, à côté d'un nuage sombre, son pâle front