page suivante »
302 M. GuéfiOIRE ET SRS ÉCRITS. entendu résonner dans votre cœur les accents indistincts d'une vague et confuse harmonie? N'avez-vous jamais, quand l'âme se reporte aux temps écoulés, senti tourbil- lonner en vous-même mille souvenirs mélancoliques, mille impressions fugitives soudainement réveillées dans votre âme ? C'était quelque chose d'insaisissable et d'aérien, c'était comme de lointains murmures, comme la voix de ceux qui ne sont plus ; vous éprouviez alors je ne sais quoi d'inexprimable et d'étrange, placé en quelque sorte, sur les confins de l'avenir et du passé ; toutes ces images s'agitaient, se pressaient, se heurtaient ; les sons d'une musique ineffable venaient, par intervalles, frapper votre oreille enivrée ; vous vous perdiez dans des concerts sans fin, et tout autour de vous voltigeaient des apparitions an- géliques : tel apparut Lamartine. Ce fut un applaudisse- ment général, jamais on n'avait entendu des accents plus suaves. On dévora ces pages si pleines de sentiment et de vie, on se laissa bercer avec délices par cette harmonie si douce et si pure ; on s'enivra, pour ainsi dire, de cette poésie si imprégnée de parfums tout célestes. » Tels étaient les enthousiasmes lyriques de ces jeunes et nobles âmes, qui ont pris possession d'elles-mêmes entre ces fécondes années de 1820 à 1830 ! Mais en citant ces lignes, je n'oublie pas que Lamartine ne saurait être dignement loué qu'en de beaux vers ; son éloge semble appeler cettemélodieharmonieuse, qui, depuis longtemps, hélas ! ne nous vient plus du vallon de Milly, qui parfois, ne soyons pas ingrats, s'élève encore tout près de nous, au sein même de nos brouillards lyonnais ; et, lorsqu'on voudra lire une page durable sur le grand poète, on ira la demander à celui qui fut son ami, au chantre de Psyché et de Pernette. On s'imagine peut-être que M. Grégoire avait pris un