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                   ET PAUL-LOUIS COURIER.                   2!)5

homme : Tu ne seras jamais rien, c'est-à-dire, tu ne seras
ni gendarme, ni rat de cave, ni espion, ni duc, ni laquais, ni
académicien ; tu seras Paul-Louis pour tout potage, id est,
rien. » Courier passa sa vie à justifier cet horoscope, et Bé-
ranger écrivait de lui-même :
         En me créant, Dieu m'a dit : ne sois rien.
   Non ! ils ne voulurent rien être, ni l'un ni l'autre, que deux
génies immortels.
   Mais Courier eut bien conscience de sa valeur littéraire :
il a fait sur lui-même une critique où se retrouvent toutes
les qualités de son talent, et il ne fut jamais plus justement
et plus impartialement jugé. Tous les éloges qu'il s'y donne
sont vrais, et il aurait pu ajouter comme Horace :
            Exegi monumentum Å“re perennius,
               . . . , . . Multaque pars mei
            Vitabit Libitinam.
   Quant à Béranger, il n'en est pas de même, il a toujours
parlé de lui avec embarras, pour ainsi dire; il trouve, sur
ce sujet, des formes d'une humilité vraie, naïve, touchante
même, car elle est sincère et ne ressemble guère à l'orgueil-
leuse affectation de certaines de nos gloires contemporaines.
Dans sa préface à l'édition de 1825, il s'adresse à ses vers:
                                               *
          Petits Poucets de la littérature ,
          S'il vient un ogre, évitez bien sa dent;
          Ou, s'il s'endort, dérobez sa chaussure ,
          De s'en servir on peut juger prudent.

   Lafontaine (car on ne peut parler de l'un sans songer à
 à l'autre), dans toute sa bonhomie, élait, avec juste raison,
 un peu moins modeste, quand il disait :
          Anacréon, et les gens de sa sorte ,