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DK L'HABITUDE. 139 de celte disposition naturelle à l'imitation ; on trouve dans les auteurs de nombreux exemples d'affections nerveuses qui n'avaient pas d'autre origine. Les impressions que l'homme éprouve de la part des ob- jets matériels avec lesquels il se trouve en rapport, peu- vent par la continuité ou la périodicité de leur action, exercer une singulière et mystérieuse influence sur la for- mation et sur l'enchaînement des idées. Laissons, sur ce sujet, parler le docteur Martin. « Doit-on classer dans la catégorie des habitudes ces préoccupations de l'esprit ou plutôt de l'imagination, qui, trompées dans leur attente, produisent une telle pertubalion dans la série et l'ordre d ' pensées, qu'il devient impossible de les lier méthodiquement dans le discours ! Ce doute m'est suggéré par la singulière observation consignée dans une notice biographique sur le professeur Emmanuel Kant qui, dans le siècle dernier, changea la face de la philosophie en Allemagne. Pendant ses leçons, il avait les yeux habituellement fixés sur un de ses élèves à l'habit duquel il manquait un bouton; il s'était tellement préoccupé de l'absence de ce bouton, que celui-ci ayant été replacé, il ne pouvait plus suivre le fil de son discours II manda l'élevé chez lui et le pria de faire ôter ce bouton afin qu'il ne fût plus un obstacle à l'ordre et â la sé- rie de ses pensées dans ses leçons publiques. » Si les habitudes physiques peuvent prendre sur l'organisa- tion un empire absolu, les habitudes morales peuvent domi- ner et enchaîner jusqu'à un certain point la liberté humaine ; cette domination qu'elles exercent souvent à notre insu peut même se changer en un despotisme absolu devant lequel peut disparaître le libre arbitre. Les réflexions auxquelles l'auteur se livre sur les habitu- des morales ne sont que les développements de cette propo- sition du chancelier Bécon : « Nos sentiments tiennent plus