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308 lion ne valait pas un potage, et ils y renoncèrent; alors, ne pouvant se décider à rentrer dans la vie commune, ce qui eut été épicier au delà de toute expression, ils tentè- rent de se métamorphoser en Tremnor ; l'idée n'était pas mauvaise, car Tremnor considéré au point de vue bouffon est un type assez remarquable ; mais, malheureusement pour représenter ce personnage au naturel, il faut, sinon avoir été guillotiné, du moins avoir passé quelques années au bagne, et tout le monde n'a pas cet avantage. Ce type fil long feu ; ce fut un fiasco complet, qui découragea profondément les novateurs. Il fallait pourtant à tout prix réveiller les esprits blasés par une conception tout-à -fait originale, mais où la trouver? On avait tout inventé dans l'ordre historique et dans l'ordre politique ; l'ordre botanique même, ordinaire- ment si facile à exploiter, n'offrait aucun moyen de sortir d'embarras; la société d'horticulture venait d'en tirer la graine de chou monstre et les carottes obélistiques! Comprenant enfin que, pour créer quelque chose de neuf et d'attrayant, il fallait de la verve et de l'esprit, les habiles de ce temps-ci, pourévUer tous frais d'imagination, se réfugièrent dans le genre sérieux et inventèrent le néo-chrétien. Ce fut un coup de maître. Ce phénomène qu'on ne pouvait classer dans aucun ordre connu, participant un peu de tous, satisfit surtout amplement les exigences scientifiques. Les naturalistes cherchèrent si l'in- dividu appartenait aux félins ou aux anthropomorphes, et déclarèrent que cette découverte était une présomption suffi- sante qu'il naissait tous les jours dans notre hémisphère des animaux encore inconnus. Quoiqu'à aucune époque l'humanité n'ait eu autant de Sauveurs qu'aujourd'hui, car on ne saurait faire un pas sans marcher sur un Messie ayant une religion en poche, le néo- christianisme n'est point de la famille du Saint-Simonisme, ni de celle des adorateurs de Mapa, ni de celle des Évadiens