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88 rait abdiqué la mission de protéger et de faire avancer les peuples dans les voies nouvelles de la liberté. Quel que soit le jugement (pie l'on porte sur ees idées que M. Charles Didier a adoptées avee d'autant plus d'empressement qu'il appartient par sa naissance au culte delà déforme, on ne saurait leur refuser de l'importance, el les considérations religieuses el politiques qu'elles ont inspiré à l'écrivain ont une liante portée sociale. Pour nous qui sommes loin d'admettre, à cet égard, toutes les idées de M. Charles Didier, nous louerons sans réserve le sentiment, répandu dans tout son livre, des transformations successives de l'humanité qui doivent la conduire du règne de la promesse à celui de l'accomplissement ; ce courage généreux qui, en face de nos misères el de nos petites passions, ne déses- père ni de l'avenir politique de l'Italie, ni de l'avenir de la France et du inonde ; ees longs appels au b i e n , à la liberté, au devoir , à l'avènement, d'un Christianisme qui s'insinue de plus eu plus dans les veines du corps social. Chose étrange et dont peu de personnes se doutent ! le Christianisme n'a encore pénétré que les surfaces de la société ; allez au fond, et vous trouve- rez encore solide, à peine ébranlé le vieil esprit du paganisme ; mais du jour (pie l'idée et les mœurs chrétiennes auront pénétré plus avant dans la société , vous serez élonué de toutes les transformations qu'amènera le Verbe divin dans tous les ordres de développement de la pensée humaine, dans les institutions sociales, dans les rapports d'un peuple avee lui-même et avec les autres peuples. Il faut louer les écrivains de se préoccuper de ce grand mystère d'une Rédemption féconde, alors mènie qu'eu marchant vers le même but, nous ne partageons pas les mêmes opinions sur les formes el sur les movens. La philosophie à laquelle appartient M . Charles Didier peut se résumer en deux mots : Kl le interprète la mystérieuse Incarnation chrétienne en ce sens qu'il y a identité entre la Divinité faite homme et riiumanilé devenue Dieu. Après tout, quel que soit l'accueil réservé aux espérances, aux idées, au dogmatisme de cette philosophie, les penseurs ne liront pas sans intérêt l'éloquent résumé qu'en a présenté M. Charles Didier dans sa lettre à Béran- ger, de même que les artistes s'inspireront avec fruit de ses tableaux du paysage italique. Pour dire en deux mots ce que nous pensons île ce livre, nous dirons qu'il n'est pas mal de le lire, même après avoir lu les pages que Byron, Chateaubriand et Edgard Quinct ont écrites sur l'Italie. Les personnes qui ont visité cette terre du Latium retrouveront quelque chose de leurs souvenirs dans ce qu'ils ont de plus vivant et de plus poétique. Ceux qui n'ont visité ces campagnes romaines qu'en imagination et en espérance, auront une nou- velle source pour donner des couleurs et des formes à cet idéal de choses que nous n'avons pas vues. Quel est le poète qui n'ait songé à voir, au moins une fois dans sa vie, ces m a g e s méditerranéens sur lesquels le passé a déposé la plus grande part de sa poésie. Qui n'a pas cru, à un certain moment de sa vie, que le spectacle de la nature italique devait guérir la blessure que font les désirs. Ce n'est pas en vain (pie nos ancêtres, les Barbares, attirés p a r l a douceur du ciel el les grappes du coteau d'Lvandre, franchirent les Apennins. Il est resté, dans noire sang, dans notre âme., quelque chose de cet instinct mystérieux qui nous pousse vers cette terre foulée par Brennus , non plus pour la dépouiller, mais pour en admirer la beauté, non plus pour détruire ses villes el boire le vin de ses pressoirs , mais pour vénérer ses campagnes religieuses et devenir peut-être un jour l'instrument de sa délivrance. T.