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49 bien-être éprouvé ; le second, redouté mais inévitable. Plu- sieurs causes portent l'homme à rechercher ce premier effet, de l'opium : des douleurs physiques qui sont ainsi calmées périodiquement, des douleurs morales, la misère et des cha- grins sur lesquels on cherche à s'étourdir. On a remarqué, à l'occasion de grandes disettes dans l'Inde, une consommation d'opium bien plus considérable ; les malheureux cherchaient ainsi à calmer les douleurs et les exigences de l'estomac, à oublier leur triste position. On prend ensuite l'habitude de ce qui, dans le principe, était une nécessité. Cependant, le plus souvent, ce n'est qu'une affaire de luxe ; on recherche la jouissance pour la jouissance elle-môme. Le premier effet produit par l'opium, c'est une excitation toute particulière. Ce n'est pas un songe, car les forces extérieures ne sont pas en- chaînées, les fonctions de l'esprit ne sont pas activées ; des philosophes et des poètes l'ont essayé en vain. On est alors entouré comme d'une fantasmagorie qui varie selon le carac- tère de l'individu. Aussi notre vieux proverbe : Au fond de la bouteille, le caractère, peut s'appliquer à l'ivresse de l'opium; il y a, on peut le dire, excitation de certaines dispositions du sentiment, en même temps que de l'activité musculaire. Par l'opium le guerrier s'excite aux combats, et l'assassin au meurtre. Les fameux pendarris de l'Inde étaient toujours ivres d'opium, aussià bien que leurs chevaux qui couraient alors 20 à 30 lieues par jour. Il arrive fréquemment, dans l'Orient, qu'un cavalier, voulant forcer la marche, partage fraternelle- ment sa provision d'opium avec son cheval. Après cette exci- tation arrivent l'abattement, la tristesse, l'engourdissement du système musculaire. Par l'habitude de l'opium et la répétition de fortes doses, le visage pâlit et maigrit ensuite, les yeux restent injectés, la démarche est chancelante, les mouvements convulsifs et tremblottants. Il y a incapacité pour toute espèce de travail de 4