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ehar de mort, ils s'embrassaient^ autant que leurs liens pou
vaient le permettre (1) ; ils répétaient d'une voix forte et tou-
chante un refrain qui les avait souvent transportés du plus
noble enthousiasme, durant les jours du siège :
                    Mourir pour la pairie ,
          Ces! le sort le plus beau, le plus digne d'envie.
On vit souvent des femmes de condamnés attendre l'heure où
leurs époux seraient traînés à l'echafaud, se précipiter vers
eux, s'asseoir sur le même char, les couvrir de leurs bai-
sers , de leurs pleurs, et partager leur mort. Il y eut des jeu-
nes filles qui, pour sauver leurs pères, consentirent à un sa-
crifice plus affreux que celui de la vie, et qui furent appe-
lées, par les mêmes monstres dont elles avaient pu suppor-
ter les embrasseracnls , à venir voir expirer leurs pères ; trait
de férocité qui se trouve dans l'histoire de plusieurs pros-
criptions. Mais voici des horreurs qu'aucune proscription n'a-
vait encore montrées,
    « Je m'indigne, dit Collol-d'lleibois à ses satellites, de ce
« que la vengeance de la patrie soie ainsi morne et silen-
« cieuse ; c'est à coups de foudre qu'elle doit frapper ses
 « ennemis. »
    La place des Brotteaux (2) est disposée pour un nouveau
genre de supplice. Soixante-neuf individus de tout sexe et de
tout âge y sont conduits attachés deux à deux (3). Collot-
 d'Herbois donne le signal. 11 part une décharge de canons à mi-
 traille : peu de victimes ont obtenu la mort ; les autres, dé-
chirés , mutilés , poussent les plus lamentables cris. Des coups
de fusils sont tirés sans interruption. Un grand nombre de


   (1) A Paris, les condamnés étaient conduits à la mort assis sur des charrettes :,
à Lyon, au contraire, tous y allèrent à pied.
   (2) La plaine des Brolleaux et non pas la place. Sir Walter Scott, dans soft
Histoire de la Révolution française, a fait la même •jifiBun,
   (5) Ils étaient soixante, et non pas soixante-neuf. Voir, là dessus, la 17* li-
vraison de la Revue du Lyonnais,