Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
358                  LA R E V U E LYONNAISE
chapeau. Un arrêté local les autorise en effet à revêtir le costume
européen, à l'exclusion des deux autres classes. Tenus à l'écart
par les blancs, méprisés des natifs, ils sont, d'après le dernier r e -
censement, au nombre de 1,240 à Pondichéry. Leur teint généra-
lement très foncé noircit avec l'âge. Quelques-uns, arrivés parleur
commerce ou leur industrie à une certaine aisance, sont bien logés,
bien meublés, vivent largement et s'allient parfois aux blancs. La
plupart sont misérables, ce qui ne les empêche pas de se draper dans
leurs haillons, et de porter fièrement les noms souvent très aristo-
cratiques qu'ils empruntent aux premiers auteurs du croisement.
Les femmes naturellement laides s'enlaidissent encore avec des
robes, des crinolines et des chapeaux de France. Cet attirail qui
est la chose du monde la moins faite pour elles, les écrase et leur
donne des démarches affreusement gauches. Elles présentent quel-
quefois, comme circonstances atténuantes, des pieds et des mains
remarquables par leur exiguïté. Les moins fortunées remplissent en
ville l'office de couturières ; il leur arrive de s'attarder chez les
 garçons.
    Les Musulmans, très peu nombreux, sont de grande taille. Des
 barbes de patriarches encadrent leurs physionomies généralement
 régulières et intelligentes. Ils portent des turbans de couleur enrou-
lés d'une façon spéciale, un costume complet de toile de couleur
plus soigné que celui des Indiens, des babouches à bec retourné
 qu'ils entrent à demi, et qui impriment à leur marche une sorte de
 pesanteur solennelle. Ils ont deux mosquées à Pondichéry, et bien
 souvent, le soir, le vent du sud m'apportait la note étrangement
 triste de leurs muezzins.
     Ce sont les tailleurs et les cordonniers de l'Inde. Leur marchan -
 dise est à bas prix, mais des plus éphémères, et ils ne savent pas
 travailler sans modèles. Quelques-uns sont embrigadés dans la
 police, et ils rendent dans leurs contacts avec la population indienne
 des services d'autant plus précieux qu'ils ne sont arrêtés par aucun
 préjugé de caste. Leurs femmes, toujours enveloppées d'un voile
 épais, ne l'ont pas soulevé pour moi, ce qui me met dans l'impossibir
 lité d'exprimer une opinion quelconque à leur égard.
     Les Indiens constituent la presque totalité de la population. Le
 dernier recensement en a compté 130,000 pour Pondichéry et ses