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                  LE MARIAGE DE SÉVERINE                             99
   — Un ami intime de mon mari et de moi-même, le comte Mau-
rice d'Artannes; je me hâte de vous dire son nom, car c'est son
seul titre à votre bienveillance.
    — Si je ne me trompe, dit le banquier, vous me l'avez présenté
chez moi au bal?
    — En effet.
   — Autant que je me rappelle, il suffît de le voir pourêtre prévenu
en sa faveur. Ne s'occupe-t-il pas de poésie ?
    — Précisément, dit Glotilde en réprimant un sourire, est-ce un
crime à vos yeux?
    — Nullement. Mais enfin que fait-il, quels sont ses projets?
    — Ce qu'il fait? mais vous l'avez dit, il s'occupe de poésie. Ses
 projets? c'est de continuer.
    — Il a quelque fortune?
    — Aucune. Une doit qu'à son travail la position aussi honora-
 ble qu'indépendante dont il jouit aujourd'hui.
    — Ma chère amie, dit M. Lefort après un court silence, je se-
rais très flatté d'une alliance avec un aussi galant homme que
M. d'Artannes, mais je .vous avouerai franchement que, pour les
raisons que je vous ai exposées, je préférerais Fernand. Vous
auriez grand tort de voir dans mes paroles quoique ce fût de déso-
bligeant pour votre ami, et la preuve, c'est que je prends très volon-
tiers l'engagement de reparler de lui avec vous si Séverine persiste
 dans sa résolution. Oui, ajouta-t-il en voyant la surprise de Clotilde,
je veux essayer de la faire revenir sur ce qu'elle vous a dit, et
 c'est seulement lorsque j'aurai perdu tout espoir de ce côté que
nous causerons de M. d'Artannes avec la considération que je dois
à quelqu'un présenté par vous. »
    Cette conversation n'était pas pour effrayer Clotilde ; en dépit du
 rêve caressé avec obstination par M. Lefort, le sort du jeune
 Chauret lui paraissait surabondamment indiqué : il irait grossir
 et terminer la liste des prétendants éconduits de Séverine. Quant à
 Maurice, si le banquier tenait autant qu'il le disait à marier sa
 fille et la laissait finalement libre de suivre son inclination, il
 n'avait aucune inquiétude à concevoir. Elle prit cependant la ré-
 solution de taire tout ce qui venait de se passer à son ami, puis-
 qu'en lui remettant le soin de ses intérêts il l'avait laissée mai-