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U LA R E V U E LYONNAISE au sérieux, est fort pénible ; elle se complique par la nécessité d'avoir recours à des interprêtes, et d'appliquer concurremment le droit métropolitain des arrêtés locaux aussi innombrables que les grains de sable de la mer et une sorte de législation indoue incohé- rente et non codifiée. Il semblerait qu'on dût tenir compte au ma • gistrat de ces difficultés jointes aux amertumes de l'exil; cepen- dant, et sous le fallacieux prétexte qu'on a trouvé jadis quelques brebis galeuses dans le troupeau, il n'obtient qu'à grand'peine son retour en France et doit subir presque toujours une notable déchéance de situation, Les ponts-et-chaussées font des ponts, des chaussées, des routeg et tout ce qui concerne leur état, comme en France, sauf un peu plus de poussière. Le commissariat de la marine, dont bien des gens ne soupçonnent pas l'existence, administre la colonie et produit scrupuleusement les mille écritures inutiles, mais moulées, que demande toute ad- ministration française. Ces messieurs ont des chapeaux à claque, desépèes, des uniformes de sous-préfet constellés d'argent; on les décore facilement et chacun d'eux a une place de gouverneur dans sa giberne, je veux dire dans son encrier : ce sont de fort heureux commissaires. Le commerce, autrefois florissant, se réduit à fort peu de chose. Ajoutez à cette nomenclature trois curés, trois officiers, deux médecins, deux pharmaciens, un trésorier, un notaire, et vous aurez le Pondichéry social au grand complet; moitié moins d'élé- ments que dans la plus déshéritée des sous-préfectures, moitié moins de cordialité dans les relations. Chacun vit chez soi, comme une bête fauve blessée dans sa tanière. Le trait d'union banal des cercles et des cafés manque absolument; on ne se mêle que deux ou trois fois l'an aux bals officiels du gouverneur. La question du mariage est pourtant une des premières à l'ordre dujour. Une phalange de vieilles dames, capables, comme on disait jadis, d'unir le grand Turc à la république de Venise, passent leur vie à faire naître des sympathies, à les transformer en sen- timents, et à creuser le gouffre du ménage sous les pas des céliba- taires imprudents. Tant pis pour qui se laisse choir! Le masque tombe, la femme reste, et la dot s'évanouit. Il fut un temps, à Pon-