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LA R 0 S E 194 Cette ballade fort bien versifiée n'est pas cependant ce qui me plaît le mieux dans la manière de M. Maurice Richard. Je voudrais que cette ballade se liât plus intime- ment à la pièce qu'elle précède. Pourquoi, par exemple, le poète loue-t-il ses interprètes d'avoir découvert une pépite dans le filon de sa mine ? d'avoir mis le feu aux cotrets qu'il avait assemblés? Je sais bien qu'à la rigueur on peut comparer des vers à des pierreries, à des diamants, à des pépites enfin, qu'un habile diseur fait valoir en les faisant en quelque sorte scintiller et resplendir, aussi cette ballade conviendrait-elle à un volume de poésies. Mais une pièce de théâtre n'est pas un recueil de vers. Elle est sur- tout composée de personnages qui doivent parler, agir, vivre sur la scène. C'est donc d'avoir bien incarné ses héros, d'avoir fait vivre pendant quelques instants, d'une vie bien réelle, ces êtres de pure imagination : Pierrot, Polichinelle, Colombine, Arlequin, etc., que l'auteur aurait dû louer ses interprètes. Sa ballade devrait, en un mot, nous parler davantage des personnages de la pièce qu'elle précède. Qu'il me suffise donc de citer de cette ballade le couplet suivant qui m'a surtout plu : Ma Galathée attendait froide et nue Qu'on l'animât ! — Sortez, espoirs secrets, L'heure de vivre est pour elle venue, Une rougeur est déjà sur ses traits, Sa lèvre exhale un souffle jeune et frais. Le mythe ancien grâce à vous ressuscite, Par vous tiré hors de son humble gîte, Voici qu'enfin ô miracle ! voici Que sous vos doigts le marbre ému s'agite. De tout mon cœur, chers compagnons, merci.