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268 LES BIBLIOTHÈQUES DE LYON amour de la lecture. Cependant, parmi les clients de la maison où il était employé se trouvait un homme illustre, le célèbre Koyer-Collard, qui était également un amateur éclairé. Le jeune apprenti était souvent chargé de porter chez les clients les bonbons et les sucreries. Un jour qu'il se présentait chez Royer-Collard, il arriva qu'au lieu de le faire attendre dans le vestibule, on l'introduisit dans la bibliothèque; une des vitrines était ouverte, et l'ins- tinct du bibliophile l'emportant sur le sentiment du devoir professionnel, le jeune Randin, se débarrassant de ses pièces montées, se jeta avec transport sur les richesses étalées à ses yeux ; le célèbre homme d'Etat vint à entrer dans ce moment et resta singulièrement surpris en voyant le gar- çon confiseur absorbé dans la lecture d'un vieil ouvrage du xvie siècle, mais il fut bien plus étonné encore, lorsque, au premier mot qu'il lui adressa à ce propos, il reconnut dans cet étrange amateur des connaissances littéraires et bibliographiques beaucoup plus étendues que non-seule- ment la profession, mais aussi la jeunesse lui permettait d'attendre de l'apprenti. Aussi Royer-Collard fut-il si émer- veillé qu'il n'hésita pas à inviter le collègue d'un nouveau genre en bibliographie à venir .le voir quelquefois les dimanches. Il se fit un plaisir de lui ouvrir sa bibliothèque et de l'aider de ses connaissances. C'est aussi grâce à cette illustre relation que M. Randin eut l'occasion de voir et de connaître plusieurs des célèbres bibliophiles de Paris. a II est facile de comprendre quels progrès il dut faire dans un pareil milieu ; aussi, quand il partit pour aller s'installer à Saint-Etienne, l'ex-apprenti confiseur em- portait avec lui trois malles pleines de livres précieux, qui aujourd'hui suffiraient à constituer une bibliothèque d'une valeur exceptionnelle, et que cependant il avait