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LES BIBLIOTHÈQUES DE LÃON 267 alors que je débutais timidement, et sa bonhomie si bien- veillante, sa cordialité si sincère, m'avaient bien vite fami- liarisé avec lui ; mais lorsque j'entrepris le travail difficile, je puis dire, maintenant, téméraire, d'annoter l'Histoire des ducs de Bourbon et des comtes de Forez, de La Mure, dont M. de Chantelauze avait été autorisé à publier le manuscrit, dès ce moment je conquis, sans réserves, les sympathies de M. Randin, qui avait pour sa patrie, le Forez, une affection sans bornes. Je fus amené, en même temps, à reconnaître qu'il avait non-seulement en biblio- graphie, mais même en histoire provinciale, des connais- sances plus sérieuses que l'on ne pouvait le supposer d'abord. Il me communiqua plus d'une observation et plus d'un renseignement, dont j'eus l'occasion de tirer bon parti. « M. Randin n'était donc pas un bibliomane, mais un bibliophile dans le vrai sens du mot, tout aussi bien que M. Rostain, et si la mort ne l'avait pas prévenu, il aurait, lui aussi, laissé un titre littéraire. Il avait entrepris de rééditer la Gazette françoise de Marcellin Allard ; il pos- sédait déjà très-bien son sujet, avait réuni tous les élé- ments de cette publication, lorsqu'une fin prématurée est venue lui enlever cette satisfaction, en même temps qu'elle a privé les amateurs de notre ville littéraire d'une nouvelle source de lumières et de jouissances. « Du reste, pour comprendre comment M. Randin aimait les livres, il faut savoir comment ce goût lui était venu et comment il s'était développé. Ce goût était inné chez lui,et c'était à Paris qu'il avait eu l'occasion de com- mencer à le satisfaire ; il était alors tout jeune et simple apprenti confiseur, et consacrait déjà ses moindres instants de loisir et toutes ses économies à acheter des livres sur les quais,, et guidé simplement par son instinct et son