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498 VICTOR CE LAPRADE et Poèmes avaient déjà conduit le poète à son but, qui était de nous inspirer un sentiment vrai des harmonies de la nature avec le monde moral, et de la réhabiliter ainsi a nos yeux. Les Symphonies et les Idylles héroïques me donnent la représentation d'un coureur dans l'arène s'avançant au même terme par les mêmes chemins que la veille, hormis deux ou trois qu'il prend le long de sa course pour la pre- mière fois, lorsqu'il est fatigué lui-môme des ornières déjà battues et lorsqu'il a fatigué de son jeu monotone les spec- tateurs qui remarquent à peine les changements trop tardifs et trop rares qu'il y apporte et se demandent, dans leur ennui, s'ils doivent lui en tenir compte. Ne voyant pas le piège que lui cache son enthousiasme pour la nature, Victor de Laprade a cru la renouveler en lui attribuant, comme Lafontaine à ses bêtes, des sentiments humains, et en outre une part active dans les aspirations et les résolutions de l'âme. 11 l'avait fait dans Psyché. Lorsqu'on reprend sa pensée, même avec l'intention de lui donner plus de force ou plus d'étendue, on risque fort de ne produire qu'un pastiche. Quoi qu'il en soit, les grands talents sont toujours les grands talents, et jusqu'à leurs fautes, il n'est rien dont ils ne sachent tirer parti. Puisque l'erreur de Victor de Laprade nous a valu les différentes pièces dont j'ai cité plus haut les titres, nous pouvons dire : Félix culpa ! Dans les trois pre- miers et dans le Chœur des hospitaliers de la quatrième, le poète est le Corneille de la nature. L'Jlpe vierge est la comparaison de la haute montagne au sommet vierge et lumineux, mais dont la base cependant tient a la vallée pleine de ténèbres, de souillures et de sang, avec l'âme dont la région la plus élevée reste inaccessible aux passions, quand Ja plus infime est foulée par leur impur troupeau; analogie admirable et sans précédent, il me