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LE PAGE DU BARON DES ADRETS. 251 cenac, et Changy, le comte de Sault, les bourgeois, et les échevins?les moines et le populaire? Ruffy répondit à tout. — Beaumont avait amené du Dauphiné un page qui n'était autre qu'une jeune fille d'une rare beauté. Au mépris de toutes les convenances, de sa dignité et des mœurs, il l'avait traînée à sa suite déguisée en homme, chevauchant avec lui dans les marches de l'armée et mettant l'épée à la main à ses côtés dans les combats. Depuis que Lyon était aux Huguenots, Beau- mont avait voulu pour résidence le somptueux apparte- ment des archevêques, à Pierre-Scize ; là son page avait repris les habits de son sexe et, belle de sa beauté, de sa jeunesse et des atours que le baron lui prodiguait, la jeune fille présidait des Cours d'amour, et des fêtes auxquelles, au lieu de n'admettre que les vainqueurs, on invitait surtout les vaincus. Avant peu, sans doute, on ne verrait plus à la table du général que le jésuite Auger et l'avocat Rubys, assis entre Maugiron, Tavannes et Mandelot, avec l'abbesse de Saint-Pierre pour vis-à -vis. Les catholiques rassurés relevaient partout la tête, les huguenots perdaient courage, le comte de Sault, comme à l'ordinaire, ne disait rien, et Blancon, devenu, sinon un damoiseau efféminé, du moins un ingénieur convaincu, avait quitté l'épée pour S'équerre et le compas, et pas- sait ses journées, un niveau à la main, au milieu des maçons et des voituriers chargés d'ouvrir des rues dans divers quartiers de la ville. Du reste, les bourgeois satisfaits restaient tranquilles, attendant que le roi intervînt et envoyât une armée pour remettre Lyon sous son obéissance, ce qui, au train dont