Revue du Lyonnais » série 3 - n°9 ( 1870 ) » pp.081

                    POÉSIE




            LES BATONS D'ÉCHELLE

  Un précepteur était chargé d'instruire
  Un fils de prince ; inutile de dire
     La dynastie ou la maison :
     Constitutionnel ou non,
  On l'instruisait et l'on avait raison.
La meilleure leçon n'est pas d'apprendre à lire.
  Ce précepteur un jour lui fit construire
    Pour lui servir d'enseignement,
          Une échelle.                :\
  Bon! direz-vous, la méthode est nouvelle '...
  C'était un maître maçon.-—Nullement.
Cette échelle était peinte en couleurs différentes ;
Quelques bâtons dorés occupaient le sommet,
Puis d'argent, puis de pourpre et de beau violet
     Où l'écarlate se mêlait :
Tant de si beaux bâtons vivaient mieux que de rentes.
Le soleil en jouant renvoyait leur éclat
Sur d'autres plus nombreux et de classe inférieure
Mais dont le noir vernis, le dessin délicat
     Annonçait un fort bon état.
   Certes, la place était encor meilleure
 Que celle que tenaient, plus humblement ornés,
   D'autres bâtons plus bas échelonnés,
   Propres pourtant, mais peints de couleur brune,
   Et qui pour ce n'en étaient pas moins fiers
   Aux yeux du reste (et c'était les deux tiers)
   Froissés, ternis et sans couleur aucune.
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