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               CHRONIQUE THÉÂTRALE.



   Ce mois-ci a été marqué par l'apparition sur noire première scène de
Raymond, opéra-comique en trois actes. C'est tout simplement l'histoire do
Masque de fer, dans laquelle on a intercalé quelques personnages et quel-
ques épisodes amusants destinés h atténuer ce qu'il y a de naturellement
mélodramatique dans le sujet. L'ouvrage a réussi, et le succès, sans nul doute,
eût été en grandissant, si une indisposition de M. Ismaël ne fût venue l'in-
terrompre dés la seconde représentation.
    .M. Ambroise Thomas, l'auteur de la musique, est certainement entre tous
 nos compositeurs, un des plus habiles, un de ceux qui s'entendent le mieux
 à remplir la scène, à faire jaser les instruments, à développer un duo ou un
 final. Toutes les ressources de l'orchestre lui sont connues; malheureuse-
ment, comme bien d'autres, c'est l'idée mélodique qui lui manque ; et à
cela rien ne supplée, pas même la science. Il en résulte qu'avec beaucoup
 d'art l'Å“uvre n'est pas exempte de longueur et de monotonie. M. Ambroise
 Thomas est pourtant l'auteur d'une des plus jolies pièces du répertoire, le
Caïd, pièce qui restera, remplie de verve, d'entrain, d'intention comique,
de contrastes piquants, et, du reste, bien mieux comprise aujourd'hui par
tout le monde, par le public et les acteurs, qu'elle ne l'était autrefois. C'est
en effet fe vrai genre bouffe, la farce italienne, une caricature de la grande
musique; et, dans toute caricature, les traits doivent être fortement ac-
centués. Si M. Ambroise Thomas se rendait justice, il avouerait que tous
les airs de son Caïd sont populaires, tandis que ceux du Songe d'une nuil
 à'(lé ne peuvent se chanter qu'en face du piano et de la partition, tant
ils sont dénués de couleur et de relief.
   Raymond nous semble préférable au Songe d'une Nuil d'ail ; il y a plus de
variété. Le premier acte se dislingue par un entrain soutenu, et la grande
scène du deuxième acte se recommande par des détails très délicats ; les éru-
diis affirment que cette scène os! une imitation de la musique de Lully ; nous
les croyons sur parole, et nous nous laissons doucement charmer par celte
musique d'une simplicité qui n'est pas sans originalité, même pour des oreilles
habituées au eolor;s Rossinie». Mmc Oabel a fait dans cette scène des pro-
diges de vocalises, sous prétexte de lutter avec le rossignol, en lui f^ant sa
confidence de bergère amoureuse. Elle s'est laissé aller à des raffinements de