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DISCOURS DE M. TABAREAU. 403 Vainement les sciences transformaient incessamment la société par leurs merveilleuses applications ! Vainement elles annonçaient les nouveaux bienfaits qu'elles accorderaient à de nouveaux ef- forts ! elles restaient frappées de stérilité dans les écoles qui, cependant, promettaient à la jeunesse, en échange de ses pre- miers labeurs, de la doter des aptitudes si variées qu'elle aurait un jour à apporter dans la vie sociale à laquelle elle est destinée. Cette indifférence dans l'enseignement des sciences est un exemple de plus de la trop aveugle confiance que l'on accorde à d'anciennes maximes, faites pour des temps qui ne sont plus, et souvent en opposition avec les besoins de nouvelles générations. Elle trouve sa cause première dans la marche même de l'esprit humain, qui fut d'abord presqu'exclusivement littéraire, et ne devint scientifique qu'à des époques plus avancées de la raison humaine. Les sciences mathématiques, physiques et naturelles ne nous ont pas été léguées par l'antiquité grecque dont les chefs-d'œuvre philosophiques et littéraires sont seuls restés longtemps l'objet de nos études et de nos imitations. La laborieuse création des sciences était la tâche réservée aux sociétés modernes ; et, pendant toute la durée de cet immense travail, les écoles ne purent être qu'exclusivement littéraires. Dans ces écoles primitives, on avait donné le beau nom d'hu- manités à l'étude des belles-lettres, pour apprendre à la jeu- nesse, par ce titre d'honneur, qu'elle était appelée à l'étude des pensées morales et de toutes les connaissances qui, jusqu'à cette époque, avaient fait la gloire et la grandeur de l'homme. Par quel inconcevable empire de l'habitude, aujourd'hui que l'esprit humain a grandi de tout l'avènement des sciences, a-t-on con- servé le privilège exclusif de cette glorieuse appellation à la seule étude des lettres? Comment, surtout a-t-on pu en faire une arme si blessante pour combattre l'admission des sciences dans les écoles ? Non ! les humanités de notre époque ne peuvent plus être celles de la renaissance des lettres; et, si l'on veut qu'elles conservent encore leur éclatante signification, il faut qu'elles