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172 H. W. LONGFELLOW. semblait agenouillée à sa prière du soir ! comme un homme en prière, moi aussi, je demeurai debout. « Devant moi s'élevait une avenue de grands pins ombreux ; leurs branches s'étalaient comme celles d'un éventail, et chaque rayon de soleil qui les perçait répandait une moelleuse vapeur bleue en longues lignes inclinées. « Et affluant en pluie pressée à mon cerveau fatigué, revin- rent les songes de la jeunesse, gouttes adoucies de la pluie d'été tombant sur le grain mûr, comme autrefois sur l'herbe dans sa fleur. « Visions de l'enfance, si douces et si tumultueuses, demeu- rez, demeurez ! — Et des voix éloignées semblaient répondre : « Cela ne se peut ! elles doivent fuir loin de toi ! A ta muse il « faut d'autres thèmes, et l'âge de l'enfance n'est plus pour toi. « En ton âme réside le domaine de la poésie, rafraîchi par « des sources vivantes. Les paupières de l'œil toujours éveillé " de l'imagination sont les portes de ce'paradis. Les saintes « pensées y montent, semblables aux étoiles, et les nuages sont « les ailes des anges. » « Que désormais ton chant n'aie plus pour objet les mon- « tagnes coiffées de neige, ni les forêts résonnantes comme la « mer, ni les fleuves qui coulent éternellement et sur lesquels « les bois se penchent pour contempler les cieux penchés à leur « tour au-dessous d'eux. « Il est une forêt où résonne le bruit strident de branches • de fer ! Un vaste fleuve mugit en la traversant, et quiconque > " y regarde y voit bien les cieux noircis par le mal du péché, « mais il n'en peut ni mesurer les profondeurs ni découvrir « les rivages. « A travers les branches agitées, percent de doux rayons de « soleil ; mais vient bientôt la raffale terrible de l'hiver ; nos « espérances tombent pressées comme des feuilles flétries. Les « lèvres palissantes s'écrient : tout est fini ; et il n'est plus « possible de retourner en arrière. « Regarde alors dans ton cœur et écris ! — Oui, dans le cou- « rant profond de la vie, que toutes les formes de la souffrance