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168                   H. W. LONGFELLOW.
sentir des désirs plus élevés, la faim et la soif des intelligences.
Il est, sans doute, réservé à ce noble pays, si soucieux de la li-
berté et de la dignité humaines, de montrer au monde que ces
grands mobiles sociaux peuvent engendrer, dans la sphère des
arts, des merveilles comparables à celles qu'on admire dans les
siècles où la volonté d'un seul a régné avec le plus de splendeur.
   Toutefois, les nations sont lentes à se révéler à elles-mêmes
leur génie, à trouver le filon précieux où abonde l'or de la pen-
sée originale et vivante. Trop de liens attachent les États-Unis
à l'ancien continent, trop d'éléments divers constituent leur or-
ganisme intérieur pour que la littérature américaine aie, de quel-
que temps encore, un caractère bien distinct des littératures de
l'Europe moderne. Mais la vie des nationalités, comme celle des
hommes, a ses années et ses jours qu'il faut savoir attendre.
L'heure sonne déjà pour l'Amérique où s'éveillent les jeunes sen-
timents, où l'imagination inquiète pose timidement le pied dans
des voies inconnues. Cette génération, peut-être, verra naître
l'homme qui saura fixer des aspirations jusque-là mobiles et
incertaines. 11 sera le Dante ou le Shakspeare de l'Amérique,
comme il peut n'en être que le Malherbe.
   Longfellow appartient à cette pléiade d'individualités brillan-
tes qui, dans des directions bien diverses et sans constituer
d'école, ont déjà porté au loin l'éclat du nom américain. Les
Fenimore Cooper, les Washington Irving, Les Ralph Waldow
Emerson, les Edgard Poe sont aujourd'hui traduits dans plu-
sieurs langues, et occupent, dans l'esprit des classes lettrées, le
juste rang où les doivent placer leur imagination riche de fan-
taisie et leur langue nerveuse et facile. Longfellow seul a été
oublié dans cette liste des nobles hôtes étrangers accueillis avec
une hospitalité fraternelle par les écrivains de notre pays. C'est
une injustice que nous voudrions pouvoir réparer.
   Notre auteur est né à Portland, en 1807. Entré au collège de
Bowdoin, à l'âge de quatorze ans, il y fut reçu bachelier en 1825.
 Le printemps suivant, il partit pour l'Europe où il parcourut
successivement la France, l'Espagne, l'Italie et l'Allemagne, et,
traversant l'Angleterre à son retour, il revint dans sa patrie