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498 la fille du malheureux qui vient de recevoir le châtiment de ses méfaits. L'auteur décrit de main de maître cette scène déchirante. Il dépeint en homme qui connaît à fond le cœur humain la rapide mobilité avec laquelle le peuple passe, de la grossière sensation excitée par l'horrible spectacle d'un supplice, aux sentiments d'une douce compassion et d'un délicat empresse- ment pour la malheureuse jeune femme. Adeline est enfin rappelée à la vie, sa première pensée est pour son mari, elle veut le rejoindre. Edouard a expié ses fautes par le châtimenè qu'il vient de subir, ils peuvent désormais se réunir et oublier leurs malheurs. Mais ses sens ne peuvent supporter le sou- venir delà terrible scène dont elle a été témoin. Ses forces physiques et morales l'abandonnent. Heureusement, elle est secourue par un vieillard qui s'était trouvé avec elle dans la voiture publique de "Ville-Neuve-Saint-Georges à Paris, et qui, pendant le trajet, avait été touché d'un généreux intérêt pour les manières distinguées et pour l'air modeste de cette jeune femme. Le noble caractère de cet homme respectable est admira- blement tracé. M. Gerval, tel est son nom, emmène chez lui Adeline et sa fille. Le délire de cette femme infortunée con- tinue; il dégénère bientôt en une complète aliénation men- tale. Aussitôt qu'ils ont appris la fuite d'Adeline, Jacques et son ami Sans-Souci sont partis pour Paris. Là , sur le boulevart, ils rencontrent la chaîne des condamnés partant pour Toulon- Jacques s'arrête machinalement à regarder ces misérables ; il reconnaît son frère au milieu d'eux. A cette funeste vue., d'un geste aussi rapide que sa pensée, il saisit la croix d'hon- neur qui brille sur son habit, l'arrache, et la cache dans son sein. Pas un mot n'est dit en ce moment sur les sentiments qui agitent le fier soldat; Paul de Kock est trop habile pour par- ler mal à propos. Le geste de Jacques dit tout. Edouard, qui, au milieu des douleurs de son supplice, a