Revue du Lyonnais » série 1 - n°13 ( 1841 ) » pp.131

enfants y ont jeté dessus leurs          à feu mon mari.... et maintenant
tartines do beurre.... c'est tout        mon rôti est réduit en charbon.
mouillé.... c'est illisible.             Va, race de corbeau ! (Elle sort.)
        MADAME STAAR.
   Trompeuse créature ! si j ' a -                  SCÈNE      IX.
vais suspendu ce portrait à l'épin-
gle do ma coiffure       toute la              SPERLING, SABINE.
ville m'aurait montrée au doigt...                       SABINE.
Loin de moi ! que je ne le re-
trouve jamais devant mes yeux !             Monsieur l'inspecteur    des
                                         ponts-et-chaussées, vous aurez
       LE BOURGMESTRE.                   sans doute encore quelque chose
  Rendez-le à l'étranger.                à faire avant le dîner?
              SABINE.                                   SPERLING.
   Eh! sans doute. Il pourrait au-          Adorable demoiselle, avant et
trement trouver singulier....            après le dîner, je n'ai qu'une affai-
            SPERLING.                    re, c'est de déployer mon cœur
                                         devant vous.
   C'est à moi de le remplacer.
Je me suis fait peindre.                                 SABINE.
         SABINE, à part.                   Déployer ? Il ne s'agit pas de
                                         manteau.
  Ou plutôt empailler.
                                                        SPERLING.
            M. STAAB.
   Ma nièce est une sotte. Une pe-          Poétiquement parlant c'est un
                                         manteau, mais il est sans plis.
tite fille bouleverser toute une
                                         Belle Sabine, essayez-le ! enve-
ville respectable comme un sac           loppez-vous-en pendant l'orage
à broderie ! 11 faut que je sorte        et l'hiver.
et que je calme toute la bour-
geoisie. ( II sort. )                                   SABINE.
       LE BOURGMESTRE.                      Je suis encore jeune, mon-
   Et moi, je vais renvoyer la           sieur, et je n'ai pas besoin d'em-
députation des arquebusiers.             prunter une chaleur artificielle.
Ecoute ce que je te dis : Si ja-                        SPERLING.
mais tu introduis dans notre mai-
son un roi comme cela, je t'en-             Voulais-je vous prêter seule-
voie dans la salle desfîleuses (1).      ment ce cœur fidèle ? Non ; je
( Il sort. )                             veux vous le donner ! ( Il se met
                                         à genoux. ) Là , à vos genoux
        MADAME STAAR.                    recevez votre propriété ! dispo-
   C'en est fait de nos réjouissan-      sez-en à votre fantaisie. Le roi
ces ! Je voyais déjà une garde           s'est évanoui, mais le reine est
d'honneur devant notre porte. Je         devant moi ! Ma reine ! Ma di-
racontais tout cela dans la tombe        vinité.


  (1) Salle d'asyle et de travail pour les indigents.