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310                  LA IREVUE LYONNAISE
ouvrages, de la Recherche de la vérité. Le savant historien de la
philosophie cartésienne étant un de nos compatriotes et un de nos
compatriotes les plus éminents, la Revue ne saurait passer sous
silence ni son travail ni l'auteur qui en est l'objet.
   Malebranche naquit à Paris en 1638 d'une famille distinguée et
pieuse. Il avait, comme Pascal et Spinoza et comme plus tard Saint-
Martin et Maine de Biran, une constitution frêle et une santé débi-
le qui ne furent pas sans influence sur son tour d'esprit et sur sa
vocation. Il était, dit finement Fontenelle, appelé à l'état ecclésias-
tique parla nature et par la grâce tout ensemble. Aussi enlra-t-il
de bonne heure dans la congrégation de l'Oratoire. Cependant il
tâtonna quelque temps avant de trouver sa véritable voie et se li-
vra à des études pour lesquelles il n'était point fait : il s'occupa
d'abord de travaux d'érudition et de linguistique. Mais il conçut
bientôt pour ce genre d'études une aversion singulière qui perce
 souvent dans sa Recherche de la vérité et lui inspire contre les
 érudits les épigrammes les plus piquantes. On sait comment il
 passa de l'érudition à la philosophie. Un livre de Descartes, le
 Traité de l'homme, lui était par hasard tombé dans les mains ; il
 fut si frappé de la manière ferme, indépendante, lumineuse dont ce
 grand esprit traitait ce sujet, qu'il éprouva de violentes palpitations
 et fut obligé d'interrompre plusieurs fois sa lecture. « L'invi-
 sible et inutile vérité, dit un de ses biographes, n'est pas accou-
 tumée à trouver tant de sensibilité parmi les hommes, et les objets
 ordinaires de leurs passions se tiendraient heureux d'y en trouver
 autant. » L'esprit de Malebranche fut dès lors acquis tout entier à
 la philosophie.
    Si Descartes fut le premier et le principal maître de Malebranche,
 saint Augustin fut le second et exerça sur lui., comme M. Bouillier
 le remarque très bien, une influence presque égale. S'il emprunte à
 l'un ses habitudes toutes modernes de précision, de netteté et de
 rigueur, il prend à l'autre sa théorie platonicienne des idées, sa
 doctrine d'une morale absolue et aussi celle d'une Providence par-
 tout présente et changeant le mal même en bien au sein de cet uni-
 vers. Il résulta de ce mélange une philosophie qui répondait plus
 complètement peut-être que celle de Descartes aux besoins variés
 et complexes du dix-septième siècle. En même temps que par son