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               DU DERNIER RECENSEMENT AMÉRICAIN                     119
   800,000hommes : quelques mois plus tard, le licenciement général
   était terminé; il ne restait plus que 25,000 soldats sous les armes;
   la marine était réduite de 540 bâtiments à 35; l'amortissement delà
   dette nationale commençait, et en quinze années devait graduelle-
  ment la réduire de cinq milliards; les nègres se remettaient à l'ou-
  vrage, l'exportation du coton reprenait de plus belle; le papier-
  monnaie perdait son discrédit, un élan général pour les affaires,
  le commerce, l'industrie, l'agriculture, se produisait de toutes
  parts, la fameuse devise « forward », en avant, résonnait d'une
  extrémité à l'autre de l'Union, et le flux des émigrants européens
  roulait de nouveau ses vagues à travers l'Atlantique.
     Les événements terribles de 1870, les révolutions du vieux
  monde, la misère, le militarisme, le développement du socialisme,
  l'instabilité des constitutions, le trouble des idées et des doctrines
  qui en était la conséquence naturelle, vinrent merveilleusement
  en aide à la prospérité des Etats-Unis. De juin 1878 à juin 1879,
  prés de 470 000 émigrants ont débarqué dans le nouveau monde'.
  De 1879 à 1880 on en a compté plus de 500.000, et à l'expira-
 tion de juin 1881, il faudra ajouter à ce chiffre un autre chiffre de
 600.000. Le bureau spécial préposé à la surveillance del'émigration
 constate que, si le nombre des émigrants est en progression cons-
 tante, ce qu'on peut appeler leur qualité s'améliore sensible-
 ment.
     Lors de la grande famine de 1846, les Irlandais, qui formaient la
 masse des colons nouveaux, arrivaient en Amérique dans le plus
 pitoyable état : couverts de haillons, manquant de tout, dévorés
 par la vermine, émaciés au point d'avoir perdu la vigueur néces-
 saire au travail, abrutis par le gin dès qu'ils pouvaient gagner un
 schelling, et plongés dans ce sombre désespoir qui enlève tout res-
. sort aux caractères. A leur arrivée sur les quais de New-York, on
 les entassait dans des hangars ouverts à la pluie et à l'inclémence
 de la température, et de là on les envoyait comme une sorte de
 bétail presque aussi immonde que celui de Porcopolis dans les soli-
 tudes lointaines du Far-West. Encore la plupart de ces Irlandais
 aimaient mieux vaguer et mendier dans les bas fonds des grandes

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      L'année censoriale commence au 24 juin,