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462                   LA R E V U E LYONNAISE
et pour beaucoup de motifs, d'écrire, avec noms et pièces à l'appui,
l'histoire de la révolution lyonnaise ; l'auteur courait le risque de
froisser toutes les opinions, de réveiller des souvenirs qu'il vaut
peut-être mieux laisser dormir, de soulever des questions person-
nelles. Cette difficulté s'impose a tous les écrivains dont l'énigme
révolutionnaire a piqué la curiosité, mais le meilleur moyen de s'y
soustraire c'est encore de ne pas l'affronter. Puisque M. de la
Chapelle avait cédé à la tentation, il lui fallait (la chose était pos-
sible), sans faire un plaidoyer dans un sens ni dans l'autre, ratta-
cher ensemble, expliquer les uns par les autres tant d'événements
divers, tant d'actes disparates, entre lesquels il existe pourtant un
enchaînement rationnel ; il fallait ne laisser perdre aucun détail
 significatif ; il fallait que ces faits ainsi présentés parlassent d'eux-
 mêmes, sans forcer l'auteur à se prononcer; les lecteurs sont tou-
jours plus satisfaits de rester ainsi libres, au moins en apparence,
dans le choix de leur opinion. Le modèle existe d'ailleurs de cette
manière de faire : dans ses belles études sur la Révolution fran -
çaise, jamais M. ïaine ne fsrmuleune conclusion ! Dieu sait pour-
 tant si le lecteur reste finalement libre de conclure. M. de la
Chapelle lui, ni ne conclut ni ne nous met à même de conclure ; il
place des documents sous nos yeux, les place-t-il même tous, je
n'oserais l'affirmer, puis il nous dit : Voyez et jugez. II est impos-
 sible de rien décider sur des documents ainsi présentés ; il n'y a
pas de procès, celui de la révolution moins que tout autre, qui
puisse se juger exclusivement par écrit et sur pièces ; il faut
toujours quelqu'un pour les produire et pour les expliquer ; c'est ce
que M. de la Chapelle aurait dû comprendre, c'est ce qu'il ne sem-
ble pas avoir compris. Par suite de cette lacune, son livre laisse le
lecteur dans la situation d'esprit du chercheur qui n'a pas trouvé
le mot d'une énigme. Est-ce à dire qu'il soit absolument sans va-
leur et qu'il ne puisse rendre aucun service? Je n'irai pas certes
jusque-là: si après, comme avant, l'histoire judiciaire de Lyon, ou
plutôt l'histoire de Lyon sous la révolution, reste encore à faire, il
s'y trouve nombre de documents curieux à consulter pour se faire
une idée des opinions, des sentiments, du style des hommes de ce
temps; s'il n'est pas possible de distinguer nettement ce qu'ont été
les institutions et les événements, il est permis tout au moins d'en-