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LE SUICIDE 91 naturelles servent à lutter contre ceux qui viennent de la nature. Parmi les causes du suicide, il faut placer en première ligne la folie. D'après les calculs des auteurs qui se sont occupés de ces ma • tières, le tiers environ des suicides s'explique par cette cause. D'autres sont déterminés par des maladies fort proches parentes de l'aliénation mentale, telles que le délire aigu et l'hypocondrie. Dans cette dernière, l'état des organes enfante des idées noires, et ces idées noires, à leur tour, réagissent de la manière la plus fâcheuse sur l'état des organes. Il y a là comme une action et une réaction du physique sur le moral et du moral sur le physique, qui poussent quelquefois le sujet à se donner la mort pour mettre fin aux souffrances qu'il endure. Rien ne prouve d'ailleurs qu'il ne puisse, en redoublant d'efforts, résister au mal et sortir vainqueur de la lutte. Des suicides moins fréquents, mais assez analogues, sont ceux qui sont dus à l'influence de la température. D'après les meilleurs observateurs, ces faits sont d'autant plus communs que le froid ou la chaleur sont plus intenses. Il y eut beaucoup de suicides durant l'expédition d'Egypte ; beaucoup aussi durant celle de Russie, et les accidents de ce genre se sont souvent renouvelés depuis dans nos possessions africaines. Un genre de suicide qui se rapproche fort des précédents est celui qui se produit par imitation et d'une manière contagieuse. Qu'un homme ait mis fin à ses jours en se précipitant du haut de la colonne Vendôme et que les journaux aient raconté le fait avec quelque détail, on peut être sûr que plusieurs suicides s'ac- compliront de la même façon durant les semaines suivantes. On sait l'histoire de ce soldat qui s'était tué dans une guérite sous le premier Empire : plusieurs autres soldats se tuèrent successivement dans la même guérite. On brûla la guérite : aus- sitôt les suicides cessèrent. S'il y a, du reste, dans le suicide par imitation quelque chose de machinal, il ne s'ensuit pas qu'il échappe complètement à l'empire de la volonté : il en est, en effet, de l'ins- tinct de l'imitation comme des autres tendances de notre nature; il nous sollicite, mais il ne nous contraint pas, de sorte que les actes qu'il détermine nous sont plus ou moins imputables. Il faut en dire autant des suicides produits par une tendance héréditaire. Falret