page suivante »
62 LA R E V U E L Y O N N A I S E nous n'avions été circonvenus par notre guide, qui prétendit que nous n'y trouverions aucune provision. C'est ainsi qu'ignorant les ressources de cette hôtellerie nous continuâmes notre route, pen- dant un demi mille, jusqu'à un petit pont appelé le Pont des Ou- ïes*. Ce pont est jeté sur une petite rivière du même nom, qui descend de la Bourgogne et se jette un peu plus loin dans le Rhône. Les rochers, qui bordent ce cours d'eau de chaque côté sont d'une telle hauteur, que, sans ce pont, on ne pourrait le tra- verser. De là , par une route sinueuse, semée de cailloux, et très en pente, nous nous dirigeons vers la montagne du Credo, au som- met de laquelle nous arrivons non sans peine, par un chemin dif- ficile et à travers, la neige 2 . Là est élevée une croix de bois fort haute, près de laquelle un religieux, de l'ordre des Capucins, vint au devant de nous, accompagné d'un enfant. En effet, leur monas- tère est situé dans le voisinage. Non loin de là se trouve un chemin fort étroit, où les Espagnols ont reçu du roi de France la permission de passer pour se rendre de la Savoie dans la Franche-Comté. A peine nous y sommes-nous engagés, que nous nous trouvons dans des ténèbres si épaisseSj qu'il nous semblait que la nuit nous couvrait de son ombre. Bien- tôt éclate une véritable tempête; la grêle, la neige et le vent nous forcent à précipiter notre marche en désordre. On ne s'entend plus parler; nos chevaux s'abattent, car le chemin fort en pente est cou- ver t de glace. Dans cette nuit obscure, la vue et l'ouïe perdent à la fois toute idée exacte des choses. En somme, tous les éléments nous étaient contraires, jusqu'au feu, qui nous manquait et qui nous eût servi à nous défendre du froid et à nous montrer la route que nous avions dément de Michaille, l'un des plus anciens du Bugey. Le souvenir de la domination romaine à Chà tillon nous a été conservé par une inscription antique, rapportée parla Teyssonnière dans ses Recherches historiques sur le département de l'Ain (t. I er , p. 111). i Le Pont des Ouïes. Ce pont jeté sur là Valserine, est une des curiosités les plus re- marquables du pays. En cet endroit, la Valserine mes'ure à peine 2 mètres de lar- geur et il a suffi de placer une simple pierre équarrie et solidement fixée par des crampons de fer sur la profonde fissure, au fond de laquelle coulent, avec une rapidité vertigineuse, les eaux de ce torrent impétueux. 2 Le sommet du Credo est à une altitude de 1608 mètres au-dessus du niveau de li mer.