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BIBLIOGRAPHIE. 231 pour ceux qui étudient les langages populaires. — Je vous recommande la Veille de Noël, un chapitre fort agréable, comme M. Viel a le don de les écrire avec humour, et l'Arbre de mai, qui clôt ce joli volume. Les Rejrains du temps jadis sont bien amusants ; en tête de ce livre vous trouvez l'air noté des deux principales chan- sons puygironnaises, à côté d'un aimable dessin représen- tant le village, son antique manoir, et les marques héral- diques de ses seigneurs. Vous saurez que c'est M. Morice Viel qui est aussi l'auteur de cette fine gravure. Ne vous ai-je pas dit que ce jeune dauphinois est un artiste ? Il l'est doublement, comme peintre et comme poète; voyez le ravissant petit tableau de genre qu'il doit à sa délicate lyre : AU BORD DU FLOT « Ce soir-là , près desflotscont la voix éternelle, Sous les saules touffus, chante au pied du coteau, Elle s'était assise, — et je m'approchai d'elle, • Pour jaser un moment, comme on fait au hameau. « — Sans indiscrétion, peut-on, Mademoiselle, Ecouter près de vous la chanson du ruisseau ? Elle me regarda, triste, et de sa prunelle Une larme tomba pour réponse dans l'eau... « Alors je me souvins qu'à cette même place, Ils étaient deux, jadis, qui causaient à voix basse, Elle, la douce enfant, lui, le rêveur joyeux. « Je serrai dans ma main sa pauvre main tremblante, Et je compris pourquoi le bruit du flot qui chante Peut vous faire venir des larmes dans les yeux. » Ce sonnet est une blanche perle, que la grâce, le senti- ment, la douce mélancolie recouvrent comme des gouttes de rosée. Tel sera votre avis, amis lecteurs, j'en suis bien sûre. Notre cher Dauphiné est heureux d'accueillir avec or- gueil ce jeune poète de talent, cet écrivain plein d'esprit de bon aloi, qui lui donne : Au bord du Jabron, et lui pro- met pour bientôt une œuvre nouvelle. Le livre de M. Mo- rice Viel doit avoir une place marquée partout où l'on sait apprécier les ouvrages empreints de ce qui distingue le vrai mérite littéraire. Sa destinée est de plaire à tous les connaisseurs ; on le voit sur les tablettes des érudits, entre les mains des poètes, — comme aussi, il est déclaré char- mant sur la table ovale d'un salon. Adèle SOUCHIER.