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l'ignorance, le bien et le m a l ; les vertus nouvelles et les
anciens vices ; et enfin, au-dessus de cet abîme, sur la pous-
sière humide qu'élèvent ces vagues b r i s é e s , se dessine
comme un arc-en-ciel, gage d'une nouvelle alliance, une
triple auréole de religion, de poésie d'amour.
   C'est peut-être la seule époque de l'histoire connue de nous,
créatures d'un jour, où nous puissions étudier cette faculté de
régénération, heureux attribut d e l à famille humaine. Sans
doute, elle se manifesta cent fois, mais ces époques r é n o -
vatrices sont ensevelies dans une obscurité profonde. Le moyen
âge seul nous montre à découvert tous les secrets de celte
divine alchimie. Là, nous voyons un sang nouveau couler
goutte à g o u t t e dans les veines du vieillard., nous observons
les progrès de la vie qui renaît, nous comptons les battements
du cœur de plus en plus accélérés. Oh! qu'un pareil spectacle
est fécond en enseignements, et pour le p o è t e , et pour qui-
conque porte un cœur d'homme et de citoyen! Qu'il est à la
fois consolant et religieux! Si par fois la vue de nos misères
sociales, de notre corruption, de notre épuisement, de notre
scepticisme porte dans l'ame un découragement amer, tour-
nons les yeux vers ces âges antiques , et nous y verrons luire
un rayon d'espérance. Car si les nations vieillissent, la provi-
 dence ne meurt pas.
   Arrivé l à , MM., sur cette cîme de l'histoire, je vous deman-
derai la permission de descendre dans l'étude individuelle des
auteurs. Je ne sais ce qu'éprouvent les autres : pour m o i ,
quand je reste trop long-temps sur les cîmes élevées , le froid
m e gagne. Je m'épouvante de l'immensité : cette image de
l'infini dans l'espace qui d'abord était une admiration devient
une terreur. Et p u i s , il faut le dire, il est triste de voir les
hommes de trop haut, leurs traits deviennent indistincts : on
les aime moins, parce qu'on les connaît peu : on les fait en-
trer comme des chiffres dans les calculs de ces vastes théories :
on fait manœuvrer les abstractions comme une a r m é e , sans
connaître, sans apprécier les individus. Ce sont des ombres