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230 l'ignorance, le bien et le m a l ; les vertus nouvelles et les anciens vices ; et enfin, au-dessus de cet abîme, sur la pous- sière humide qu'élèvent ces vagues b r i s é e s , se dessine comme un arc-en-ciel, gage d'une nouvelle alliance, une triple auréole de religion, de poésie d'amour. C'est peut-être la seule époque de l'histoire connue de nous, créatures d'un jour, où nous puissions étudier cette faculté de régénération, heureux attribut d e l à famille humaine. Sans doute, elle se manifesta cent fois, mais ces époques r é n o - vatrices sont ensevelies dans une obscurité profonde. Le moyen âge seul nous montre à découvert tous les secrets de celte divine alchimie. Là , nous voyons un sang nouveau couler goutte à g o u t t e dans les veines du vieillard., nous observons les progrès de la vie qui renaît, nous comptons les battements du cœur de plus en plus accélérés. Oh! qu'un pareil spectacle est fécond en enseignements, et pour le p o è t e , et pour qui- conque porte un cœur d'homme et de citoyen! Qu'il est à la fois consolant et religieux! Si par fois la vue de nos misères sociales, de notre corruption, de notre épuisement, de notre scepticisme porte dans l'ame un découragement amer, tour- nons les yeux vers ces âges antiques , et nous y verrons luire un rayon d'espérance. Car si les nations vieillissent, la provi- dence ne meurt pas. Arrivé l à , MM., sur cette cîme de l'histoire, je vous deman- derai la permission de descendre dans l'étude individuelle des auteurs. Je ne sais ce qu'éprouvent les autres : pour m o i , quand je reste trop long-temps sur les cîmes élevées , le froid m e gagne. Je m'épouvante de l'immensité : cette image de l'infini dans l'espace qui d'abord était une admiration devient une terreur. Et p u i s , il faut le dire, il est triste de voir les hommes de trop haut, leurs traits deviennent indistincts : on les aime moins, parce qu'on les connaît peu : on les fait en- trer comme des chiffres dans les calculs de ces vastes théories : on fait manœuvrer les abstractions comme une a r m é e , sans connaître, sans apprécier les individus. Ce sont des ombres