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152 gles, qui n'a voulu que relever une pauvre église mécham- ment abattue pendant nos troubles révolutionnaires; faire une œuvre chrétienne et catholique plutôt qu'une œuvre poétique ; ou bien se créer un but de religieuses promena- des pour des jours de souvenir et de tristesse? Peu importe, du reste; si non la construction et la forme de la chapelle, le site, au moins, conviendrait pour l'une ou l'autre de mes hypothèses. La chapelle est bâtie sur une montagne entre deux val- lées. L'une, à l'ouest, est resserrée par une montagne moins élevée que celle des Conches et qui formerait son premier plan, si l'on comblait le vide; l'autre, à l'est, moins étroite, plus étendue et semée de quelques villages pauvres. La mon- tagne des Conches est aride, à peine boisée à sa crête ; des rochers grisâtres, coupés en arête et perpendiculairement au dessus de la plus petite vallée, ouvrent de larges fentes d'où s'échappent de maigres arbustes, de petits œillets rou- ges qu'un air désolé agite sur leur tige. Depuis ces rochers, jusqu'à la chapelle, et sur tout le versant du côté du matin jusqu'au bas de la montagne, c'est une herbe un peu grise et un peu jaune, courte, triste, qui n'a pour elle qu'une odeur aromatique et forte comme toutes les herbes des lieux éle- vés, et sur laquelle il serait impossible de reposer ses mem- bres fatigués, tant la terre qui la nourrit est peu épaisse sur le roc. Quand le soleil se lève, il dore déjà le petit beffroi blanc,, qu'il est encore caché par les montagnes à l'est qui bordent la vallée dans sa langueur et dont les têtes s'élevant par éta- ges semblent aller jusqu'au ciel. Ce sont les premières de la chaîne des Alpes et du Jura. Elles semblent des barrières infranchissables pour l'homme. Ce regard se promène pen- sif et interrogateur sur leurs formes qu'on prendrait quel- quefois pour des flots arrêtés brusquement dans un jour de