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gles, qui n'a voulu que relever une pauvre église mécham-
ment abattue pendant nos troubles révolutionnaires; faire
une œuvre chrétienne et catholique plutôt qu'une œuvre
poétique ; ou bien se créer un but de religieuses promena-
des pour des jours de souvenir et de tristesse? Peu importe,
du reste; si non la construction et la forme de la chapelle,
le site, au moins, conviendrait pour l'une ou l'autre de mes
hypothèses.
   La chapelle est bâtie sur une montagne entre deux val-
lées. L'une, à l'ouest, est resserrée par une montagne moins
élevée que celle des Conches et qui formerait son premier
plan, si l'on comblait le vide; l'autre, à l'est, moins étroite,
plus étendue et semée de quelques villages pauvres. La mon-
tagne des Conches est aride, à peine boisée à sa crête ; des
rochers grisâtres, coupés en arête et perpendiculairement
au dessus de la plus petite vallée, ouvrent de larges fentes
d'où s'échappent de maigres arbustes, de petits œillets rou-
ges qu'un air désolé agite sur leur tige. Depuis ces rochers,
jusqu'à la chapelle, et sur tout le versant du côté du matin
jusqu'au bas de la montagne, c'est une herbe un peu grise
 et un peu jaune, courte, triste, qui n'a pour elle qu'une odeur
 aromatique et forte comme toutes les herbes des lieux éle-
vés, et sur laquelle il serait impossible de reposer ses mem-
bres fatigués, tant la terre qui la nourrit est peu épaisse sur
 le roc.
   Quand le soleil se lève, il dore déjà le petit beffroi blanc,,
qu'il est encore caché par les montagnes à l'est qui bordent
la vallée dans sa langueur et dont les têtes s'élevant par éta-
ges semblent aller jusqu'au ciel. Ce sont les premières de
la chaîne des Alpes et du Jura. Elles semblent des barrières
infranchissables pour l'homme. Ce regard se promène pen-
sif et interrogateur sur leurs formes qu'on prendrait quel-
quefois pour des flots arrêtés brusquement dans un jour de