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 égorgés aux yeux de leurs compagnons épouvantés. Apres
 avoir passé le bourg du Treuil, le funèbre cortège s'arrêta,
 Un des détenus, le nommé Grangonnet, ancien officier muni-
 cipal, et remarquable par sa haute stature, fit un pas en
 arrière, et reçut un coup de sabre au milieu de la figure.
Son compagnon d'infortune, le nommé Guillermin aîné,
membre du Comité révolutionnaire, recule d'effroi et reçoit
d'autres coups qui le mettent à mort. Un des assaillants appli-
que son pistolet sur le cœur de Jérôme Benoît, substitut du
procureur delà commune, en lui disant : «En qualité de voisin,
je ne veux pas que tu souffres. » Ce malheureux reçoit la mort
avec la même impassibilité qui le caractérisait quand il sié-
geait au tribunal[de district. L'ex-juge-de-paix,Lyonnet, le com-
missaire de police, Chauvet, sont égorgés presque en même
temps. Un pauvre tailleur de profession, E. Badois, qui avait
été enveloppé, on ne sait comment, dans cette horrible bou-
cherie, s'était mis à genoux, et suppliait en pleurant qu'on
l'épargnât ; plusieurs coups de feu, tirés à bout portant, lui
olèrent à la fois la parole et la vie. Un seul, le nommé Esco-
mel, deSaint-Chamond, parvint à s'échapper à travers les blés.
Plus heureux, il a pu raconter celte horrible catastrophe , car
quel autre que lui a pu faire le récit de tant d'atrocités ?
   Le lendemain une stupeur générale se répandit dans toute
la ville^ et tous ceux qui avaient eu à se plaindre des excès
révolutionnaires tremblèrent par crainte des représailles. La
foule se porta sur le théâtre du crime et contempla le hi-
deux spectacle de onze ou douze cadavres horriblement
mutilés (1).
   L'administration témoigna à ses concitoyens toute la dou-

   (1) Plusieurs années après ces malheureux événements, un homme qui
avait rempli, à cette époque, des fonctions administratives, mourut à la suite
d'une maladie affreuse, le peuple, toujours ami du merveilleux, et qui lui
attribuait, peut-être à tort, d'avoir prêté la main à d'aussi horribles forfaits,
crut reconnaître là le doigt d'un Dieu vengeur!