page suivante »
476 l'incommode bout-de-nègre, cigare monstre long et gros comme le bras. Pour la France, les innovations n'ont été que le résultat d'un éclectisme honteux. Qu'elle garde la pipe d'un sou et le cigare de la Havane; si la légèreté de son carac- tère ne lui permet pas d'espérer un autre lot. L'Allemagne se montre au premier rang parmi les nations européennes pour l'importance qu'elle attache à la pipe (N). Elle a façonné la pipe de bois à laquelle nous avons donné le nom d'Oulme, soit qu'elle ait été fabriquée primitivement à Ulm, soit qu'on l'ait taillée du bois de l'orme (ulmus). Elle a inventé la pompe, utile accessoire d'un instrument aussi com- pliqué que le sien. Elle a pétri avec de l'eau, de l'huile on de la cire, cette belle magnésie blanche, terre si légère qu'on la trouva d'abord flottante sur la mer, et dont on découvrit plus tard des carrières à Dorylée dans l'Asie-Mineure (1). Nous ne déciderons point quel est le vrai nom de ce genre de pipes. En France, elles ont celui d'écumes de mer, sans doute pour la raison que nous venons de dire; mais M. A. Karr et la Phy- siologie du Fumeur lui donnent pour auteur et parrain le fa- briquant Kummer. Quoi qu'il en soit, nous en avons vu dans des boutiques d'Allemagne qui, à cause de la finesse de leur matière et des ornements qui les couvraient, étaient éva- (N) Voici une belle description des fourneaux ambulants, des jou- joux machines à vapeur; car, il ne faut pas le nier, la pipe est pour l'homme fumeur ce qu'un joujou est pour l'enfant. Combien de fois ai-je été comme vous en admiration devant ces formes variées! Quel plaisir, me disais-je, de voir s'échapper cette brûlante vapeur des yeux, du nez, des oreilles, d'un dieu, d'un empereur, d'un héros, d'un tigre, d'un lion, etc., mais aussi quelle distance entre le brûle-gueule culotté et la pipe élégante '. L'un et l'autre peuvent-ils aller ensemble? G. M. (1) Poujoulat, Voyage en Orient.