page suivante »
274 LA REVUE LYONNAISE un traitement plus dur. Celui qui ne se propose qu'une jouissance artistique devra traverser rapidement ces galeries pour aller visi- ter les élégants objets d'art exposés dans les riches salles du musée. Mais l'historien s'attardera avec plaisir parmi ces archives de pierre, et, au milieu de ces monuments à demi consumés, aimera à se sentir transporté à une époque depuis longtemps passée et presque oubliée. Certainement il ne réussira, il ne pourra réussir à reconstituer à l'aide de ces débris sauvés au caprice du hasard, un tableau complet et riche en couleurs comme nous y parvenons pour Athè- nes, pour Rome, pour Pompéi et pour quelques villes du moyen âge. Ici s'impose à chaque pas au scrutateur de l'histoire, qui ne se croit pas le droit de suppléer aux lacunes par les ressources de l'imagination ni de peindre avec des couleurs de fantaisie, le sentiment de l'insuffisance de notre savoir et la conviction que quan- tité de questions restent encore et resteront peut-être toujours sans solution. Déjà , à cette première question qu'il faudrait résoudre pour se faire une idée de l'importance d'une ville : quel était le nombre de ses habitants, nous ne savons répondre.La statistique est une science moderne. Des documents statistiques exacts nous manquent presque entièrement pour l'antiquité. Même pour Rome, c'est seulement d'une manière approximative que nous estimons à environ un mil- lion et demi d'habitants sa population au temps de la plus gran- de splendeur. Lyon comptait-il, même en son meilleur temps, deux cent cinquante mille âmes ? je ne suis en mesure ni de l'af- firmer ni de le nier. Ce qui est certain, c'est que Lyon n'a pas été une des grandes capitales du monde selon nos idées, ni même jamais d'une grandeur égale à celle de la ville actuelle. Mais l'importance d'une ville ne doit pas se mesurer uniquement au nombre de ses habitants. Politiquement et commercialement, Lyon était parvenu à s'assurer une situation prédominante. Déjà Auguste ou au plus tard Claude, l'avait choisi pour devenir une Rome du Nord et l'avait pourvu de privilèges extraordinaires. Au commence- cément de l'empire, on y frappait dans un atelier impérial de la monnaie d'or et d'argent ; une cohorte de la milice de Rome y était cantonnée en permanence ; là était le centre de l'administration