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É P I G R A P H I E LYONNAISE 185 • civilisation ? On était par le langage, par les mœurs, et même au point de vue politique et religieux, devenu insensiblement et si bien Romain, que la pensée d'une séparation d'avec Rome et d'"un retour à l'ancienne condition nationale dut paraître aux rares patriotes, encore hantés par le sentiment de ces biens idéaux d'une nation, comme une impossibilité, et au peuple, comme la ruine de sa prospérité, de ses progrès et même de sa liberté. Toutes les parties de la Gaule ne sont certainement pas deve- nues romaines d'un seul coup, ni d'une manière uniforme. Imposer par force leur propre civilisation à un peuple étranger, n'entrait pas dans le système de l'habile et douce politique de colonisation des Romains, toujours disposés à respecter autant que possible les ha- bitudes nationales qui n'étaient pas politiquement dangereuses. Suivant la nature du pays, suivant le caractère des habitants, la civilisation étrangère a pénétré dans les couches des populations promptement ou peu à peu, d'une manière plus ou moins profonde. Encore 400 ans après J . - C , un homme du centre de la Gaule s'excuse de son latin rustique devant l'élégant habitant de l'Aqui- taine, où, à l'exception des vallées sans chemins et peu fréquentées des Pyrénées qui restaient toujours fidèles aux croyances et aux coutumes locales, la forme romaine avait trouvé un accès éton- namment facile. Au contraire, au nord et au centre de la Gaule, dans les épaisses forêts de la Belgique, dans les villages de pê- cheurs du bord de l'Océan, même dans une grande partie de la province lyonnaise, la langue celtique et les usages nationaux se sont maintenus avec ténacité. Ces contrées, où la partie essentielle de la population se composait de paysans, de chasseurs et de pê- cheurs, rarement réunis dans de grandes villes, mais disséminés dans la campagne, vivant dans de petits villages ou dans des huttes isolées, ne furent qu'effleurées, jamais entièrement pénétrées par la civilisation romaine. Une civilisation parfaitement romaine ne doit être recherchée que dans le sud de la France, dans l'an - cienne province romaine — la Provence actuelle avec le Dauphiné et le Languedoc, — où la puissante ville grecque de Marseille, avec ses nombreuses factoreries, avait depuis longtemps préparé le terrain; où, sur les côtes de la Méditerranée et le long du Rhône, s'élevaient déjà , dans les derniers temps de la République, une