page suivante »
168 LA R E V U E LYONNAISE celui de ses enfants qui lui témoignait le plus d'affection et le plus d'obéissance, si ce n'est par une libéralité entre-vifs, qui avait le grave inconvénient d'être irrévocable et de dessaisir le donateur de son vi- vant ; qu'enfin elle encourageait en quelque sorte l'irrévérence des enfants, à qui elle assurait une réserveque le père ne pouvaitentamer. Ces observations, développées avec force dans l'assemblée des états de 1576, déterminèrent l'ordre de la noblesse bourguignonne à proposer aux commissaires chargés de la révision de la Coutume un article qui autorisait le père et la mère nobles à librement tester de leurs biens, en laissant une légitime à leurs héritiers, et qui don- nait en outre au père la faculté, lorsqu'il avait un descendant mâle, de constituer par testament une dot à sa fille, qui devait s'en con- tenter, sans pouvoir élever désormais aucune prétention sur la succession paternelle. La chambre du clergé des états de Bourgogne, qui comptait un grand nombre de gentilshommes dans son sein, et qui n'avait d'ail- leurs aucun intérêt à contester le principe de cette innovation,adopta l'article sans difficulté. Elle y ajouta même quelques dispositions accessoires, empruntées à la Coutume de Sens. Mais la plupart des députés du tiers état, qui répugnaient à favoriser indirecte- ment le droit d'aînesse, et que touchait médiocrement la crainte de voir s'appauvrir les familles nobles, protestèrent avec énergie contre la proposition et déclarèrent qu'ils n'avaient pas reçu mandat de modifier sur ce point l'ancienne Coutume . Quelques-uns formè- rent une opposition régulière au projet ; d'autres refusèrent de déli- bérer et firent défaut. De leur côté, les commissaires royaux, le pré- sident de la Reynie et les conseillers Jacques de Vintimille et Jean Bégat, membres du parlement de Dijon, appuyèrent de leur autorité les protestalions du tiers état, et s'efforcèrent de remontrer aux deux premiers ordres que la modification proposée serait plus fu- neste aux-familles qu'utile à leur prospérité. Mais la noblesse et le clergé persistèrent, et leur insistance fut telle que, sur la requête des trois états du duché, et l'avis des avocats généraux du par- lement de Paris, auquel la rédaction projetée avait été soumise, le roi approuva le nouvel article, le 3 juillet 1572, en en restrei- gnant toutefois l'application aux membres de la noblesse jusqu'à ce que les députés du tiers y eussent adhéré.